COMPTE-RENDU DU DÉBAT RÉPUBLICAIN DE DETROIT

Le onzième débat républicain avait lieu ce jeudi 3 mars, soit deux jours après le Super Tuesday. Compte-rendu. 

INTRODUCTION

Ce onzième débat républicain avait lieu au Fox Theater de Detroit, Michigan. Il était organisé par Fox News.

Ben Carson était le grand absent de la soirée. Mercredi, le candidat républicain avait publié le communiqué suivant sur son site web, annonçant qu’il ne participerait pas au débat organisé le lendemain.

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Carson n’affirmait pas clairement mettre fin à sa campagne dans ce communiqué, même s’il le suggérait en affirmant ne pas voir de chemin menant à la victoire après les résultats du Super Tuesday. Il concluait en disant qu’il en dirait davantage vendredi dans un discours.

Comme lors du débat précédent à Houston, Ted Cruz et Marco Rubio ont évité de s’attaquer mutuellement. Ils s’en sont pris uniquement à Donald Trump. Les modérateurs ont également confronté Trump à ses propres incohérences. Celui-ci a, comme à son habitude, répondu à presque toutes les accusations par des insultes ou en disant qu’il était le candidat le plus populaire dans les sondages. Ce qui a finalement encore une fois eu pour conséquence un débat ressemblant davantage à une émission de téléréalité qu’à un véritable débat politique.

LE DÉBAT

Participants: Donald Trump, Ted Cruz, Marco Rubio, John Kasich

Modérateurs: Megyn Kelly, Chris Wallace & Bret Baier

Durée du débat: 2h

Compte-rendu:

  • Les retrouvailles entre Donald Trump et Megyn Kelly

Souvenez-vous. Lors du premier débat organisé par Fox News, un échange très tendu avait opposé la modératrice Megyn Kelly à Donald Trump. Plus tard, Trump avait accusé Kelly de ne pas avoir été objective à son égard et avait attribué son comportement au fait qu’elle ait ses règles. Trump avait ensuite boycotté le second débat organisé par Fox News, en raison de la présence de Megyn Kelly parmi les modérateurs. Pour ce troisième débat organisé par la chaîne conservatrice, Donald Trump était de retour. Et Megyn Kelly était toujours là. Tout le monde attendait donc impatiemment d’assister à leurs retrouvailles. Elles ont donné lieu à cet échange un peu étrange, lorsque Kelly a posé sa première question à Trump.

KELLY : Mr. Trump, hi. (Mr. Trump, bonsoir)

TRUMP : Hello.

KELLY : How are you doing? (Comment allez-vous?)

TRUMP : Nice to be with you, Megyn. (Heureux d’être avec vous, Megyn)

KELLY : Great to have you here. (Super de vous compter parmi nous)

TRUMP : You’re looking well. (Vous avez l’air en pleine forme)

  • Donald Trump et le Ku Klux Klan

Une question a été posée à Donald Trump concernant la récente polémique déclenchée suite à son refus de condamner fermement David Duke et le KKK lors d’une conversation avec le journaliste de CNN Jake Tapper. Trump a été clair :

I totally disavow the Klu Klux Klan. I totally disavow David Duke. (Je désavoue totalement le Ku Klux Klan. Je désavoue totalement David Duke)

Trump dira également qu’il avait été clair à ce sujet sur son compte Twitter et que le tweet où il disait désavouer le KKK avait curieusement été moins repris et commenté que les autres par la presse.

  • Quand Donald Trump défend la taille de ses mains et d’une autre partie de son anatomie

Le débat avait à peine commencé depuis une dizaine de minutes lorsque Donald Trump a choisi de faire comprendre aux électeurs américains qu’ils ne devaient pas s’inquiéter au sujet de… la taille de son sexe ! Du jamais vu lors d’un débat politique pour la présidence. Il faut savoir que Marco Rubio avait récemment plaisanté au sujet de Trump lors d’un meeting en disant qu’il avait de très petites mains. D’où la déclaration de Trump lors de ce débat. Voici ce qu’il a affirmé, tout en levant ses mains pour que tout le monde puisse les voir :

Look at those hands. Are they small hands? And he referred to my hands, if they are small, something else must be small. I guarantee you there is no problem, I guarantee. (Regardez ces mains. Est-ce que ce sont des petites mains? Et il a fait référence à mes mains, si elles sont petites, quelque chose d’autre doit être petit. Je vous garantis qu’il n’y a aucun problème, je vous le garantis)

No comment.

  • Marco Rubio vs Donald Trump

Comme lors du précédent débat, plusieurs épisodes tendus ont opposé Marco Rubio à Donald Trump.

Épisode 1 – Marco Rubio a reconnu que Donald Trump était sorti vainqueur des élections jusqu’ici mais a également rappelé que deux-tiers des électeurs républicains qui s’étaient exprimés n’avaient pas voté pour lui. Il a ajouté qu’il ne fallait pas choisir quelqu’un qui n’était pas un véritable conservateur, ni « someone who thinks the nuclear triad is a rock band from the 1980’s » (quelqu’un qui pense que la triade nucléaire est un groupe de rock des années 80). Rubio faisait ici référence à un précédent débat lors duquel Trump avait été incapable de répondre à une question sur la triade nucléaire, ne sachant apparemment pas de quoi il s’agissait.

Épisode 2 – Comme lors du débat précédent, Rubio a insisté sur le fait que Trump prétend se battre pour les travailleurs américains mais fait fabriquer les vêtements de sa marque à l’étranger. Lui qui dit vouloir ramener des emplois en Amérique, pourquoi ne commence-t-il pas par donner l’exemple en faisant fabriquer les vêtements estampillés « Trump » aux Etats-Unis plutôt qu’en Chine ou au Mexique? Pour Rubio, la réponse est claire: parce qu’il gagne plus d’argent en produisant à l’étranger et que cela lui importe davantage que de fournir des emplois aux américains. Chris Wallace a demandé à Trump de réagir.

TRUMP : This little guy has lied so much about my record. (Ce petit homme a tellement menti à propos de mon bilan)

RUBIO : Here we go ! (C’est parti !)

Trump finira finalement par dire que ce sont des raisons économiques qui le poussent à faire fabriquer ses produits à l’étranger, confirmant ainsi d’une certaine manière les propos de Rubio.

Épisode 3 – Marco Rubio accusera également de nouveau Donald Trump d’avoir préféré engager des travailleurs étrangers plutôt que des américains pour travailler dans son hôtel/casino en Floride. Trump se défendra de nouveau en disant qu’il s’agit de contrats de quelques mois (pour la haute saison) et à temps partiel dont aucun américain ne veut. Rubio affirmera que c’est faux et que 300 américains avaient posé leur candidature. Il expliquera ensuite pourquoi Trump préfère faire venir des étrangers bénéficiant d’un visa de type H1B.

Because when you bring them in this way, when you bring someone in on one of these visas, they can’t go work for anybody else. They either work for you or they have to go back home. You basically have them captive, so you don’t have to worry about competing for higher wages with another hotel down the street. And that’s why you bring workers from abroad. (Parce que lorsque vous les faites venir de cette manière, lorsque vous faites venir quelqu’un avec l’un de ces visas, ils ne peuvent travailler pour personne d’autre. Soit ils travaillent pour vous soit ils doivent rentrer chez eux. Vous les tenez en quelque sorte prisonniers, et donc vous ne devez pas vous préoccuper de faire concurrence à un autre hôtel en proposant des salaires plus élevés. Et c’est pour cela que vous engagez des travailleurs venus de l’étranger)

Réponse de Trump ?

Other hotels do the exact same thing. And just so you understand, just again, this is a legal process. This is a procedure. It’s part of the law. I take advantage of that. There’s nothing wrong with it. We have no choice. (D’autres hôtels font exactement la même chose. Et juste pour que vous compreniez, c’est un processus légal. C’est une procédure. Cela fait partie de la loi. J’en profite. Il n’y a rien de mal à cela. Nous n’avons pas le choix)

Épisode 4 – Rubio ramènera également de nouveau l’affaire de la Trump University sur le tapis. Trump répétera à plusieurs reprises qu’il s’agit d’une « affaire mineure » et qu’il gagnera la procédure judiciaire qui l’oppose à plusieurs milliers de plaignants. Il prétendra également que ces plaignants ne représentent qu’une petite partie des étudiants de la Trump University, alors que 98% d’entre eux se seraient déclarés très satisfaits. Ce chiffre semble en réalité loin d’être correct puisque, comme le fera remarquer Megyn Kelly, le nombre de personnes ayant porté plainte contre Trump correspond à 32% du nombre d’élèves inscrits. Il semble donc qu’ils soient au moins 32% à ne pas avoir été satisfaits.

Épisode 5 – Rubio rappellera que Trump a complimenté Vladimir Poutine. Trump dira que c’est totalement faux. C’est pourtant tout à fait vrai.

  • Ted Cruz vs Donald Trump

Ted Cruz a lui aussi attaqué Donald Trump à de nombreuses reprises tout au long de la soirée.

Épisode 1 – Ted Cruz a déclaré que Trump trompait les électeurs en prétendant vouloir changer la manière dont les choses fonctionnent à Washington.

I understand the folks who are supporting Donald right now. You’re angry. You’re angry at Washington, and he uses angry rhetoric. But for 40 years, Donald has been part of the corruption in Washington that you’re angry about. (Je comprends les gens qui soutiennent Donald en ce moment. Vous êtes en colère. Vous êtes en colère contre Washington, et il utilise une rhétorique de colère. Mais pendant 40 ans, Donald a fait partie de la corruption à Washington contre laquelle vous êtes en colère)

Ted Cruz dénonçait en réalité les nombreux dons financiers que Trump a accordé à de très nombreux politiciens démocrates au fil des années. Trump répliquera qu’il était à l’époque un homme d’affaires qui ne faisait pas de politique. En tant qu’homme d’affaires, son devoir était de bien s’entendre avec tout le monde. Cela faisait partie de son métier. Il ira même jusqu’à dire que c’est parce qu’il est capable de bien s’entendre avec tout le monde qu’il parviendra à faire bouger les choses s’il est élu à la présidence. Ted Cruz dira que l’argument de Trump pourrait tenir la route s’il avait donné de l’argent à des politiciens locaux ayant une influence directe sur la réalisation de ses projets immobiliers par exemple (bien que, précisera-t-il, cela s’apparente à de la corruption). Mais il a contribué aux campagnes présidentielles de nombreux candidats démocrates, notamment à celle d’Hillary Clinton en 2008.

CRUZ : So I’d like to ask Donald, why did you write checks to Hillary Clinton to be president in 2008? It wasn’t for business. And how can you stand on a debate stage now with her and say you don’t think she should be president? (Donc je voudrais demander à Donald, pourquoi as-tu écrit des chèques à Hillary Clinton pour qu’elle soit présidente en 2008? Ce n’était pas pour le business. Et comment pourras-tu maintenant te trouver face à elle lors d’un débat et dire que tu ne penses pas qu’elle doit devenir présidente?)

TRUMP : Actually, it was for business. It was. It was. It was for business. I pride myself, including outside of the United States. I’m doing almost 120 deals outside of the – which I hope to be able to stop very soon and let my children handle it – but we’re doing many, many deals outside of the United States. I support politicians. In 2008, I supported Hillary Clinton. I supported many other people, by the way. And that was because of the fact that I’m in business. (En fait, c’était pour le business. Cela l’était. Cela l’était. C’était pour le business. Je suis fier de faire du business, y compris hors des Etats-Unis. Je fais presque 120 deals hors des – que j’espère pouvoir bientôt arrêter et laisser mes enfants s’en occuper – mais nous faisons beaucoup, beaucoup de deals hors des Etats-Unis. Je soutiens des politiciens. En 2008, j’ai soutenu Hillary Clinton. J’ai soutenu beaucoup d’autres personnes, à propos. Et c’était parce que j’étais dans le business)

Avouez qu’un candidat républicain qui déclare lors d’un débat républicain « En 2008, j’ai soutenu Hillary Clinton » est totalement surréaliste.

Épisode 2 – Ted Cruz choisira aussi de s’en prendre à Trump au sujet d’une conversation privée qu’il aurait eue avec des journalistes du New York Times.

[Une petite mise en contexte s’impose ici. Il y a quelques jours, le site BuzzFeed rapportait que Trump avait discuté en privé avec des journalistes du New York Times en janvier. D’après BuzzFeed, Trump aurait expliqué à ces journalistes quelles étaient ses véritables positions sur l’immigration et se serait montré bien plus modéré que dans ses discours de campagne (notamment en ce qui concerne l’expulsion de 11 millions d’illégaux présents aux Etats-Unis). BuzzFeed révèle également que la conversation aurait été enregistrée. Ted Cruz et Marco Rubio ont immédiatement réagi en demandant à Donald Trump qu’il autorise le New York Times à rendre l’enregistrement public, ce que Trump a refusé]

Retour au débat. Interrogé par Megyn Kelly au sujet de cet enregistrement, Donald Trump dira qu’il refuse qu’il soit rendu public parce qu’il ne veut pas trahir l’accord de confidentialité conclu avec les journalistes du New York Times. Ted Cruz attaquera Trump en suggérant que s’il refuse que l’enregistrement soit rendu public, c’est sans doute parce que les électeurs se rendraient compte qu’il leur ment. En effet, s’il n’a rien à se reprocher, il suffirait qu’il accepte que l’enregistrement soit rendu public pour mettre fin à toutes les suspicions.

Épisode 3 – Agacé d’être sans cesse interrompu par Donald Trump alors qu’il était en train de parler, Cruz finira par lui faire la leçon comme à un enfant de cinq ans.

Donald, learn not to interrupt. It’s not complicated. Count to ten. (Donald, apprends à ne pas interrompre. Ce n’est pas compliqué. Compte jusqu’à dix)

Episode 4 – Deux autres petites phrases prononcées par Ted Cruz.

I think the American people understand that yelling and cursing at people doesn’t make you a tough guy. (Je pense que le peuple américain comprend que crier contre les gens et les insulter ne fait pas de vous quelqu’un de fort)

Donald has a tenuous relationship with the truth. (Donald a une relation ténue avec la vérité)

  • Little Marco & Lying Ted

Donald Trump répliquera essentiellement à toutes les attaques de Marco Rubio et de Ted Cruz en 1) les accusant de mentir 2) les attaquant personnellement et 3) disant qu’il est mieux classé qu’eux dans les sondages.

En ce qui concerne le point 2), Donald Trump s’adressera même plusieurs fois à Marco Rubio en l’appelant « Little Marco » (Petit Marco). Celui-ci ne se laissera pas pour autant intimider, comme en témoigne cette réplique où il qualifiera Trump de « Big Donald » (Grand Donald) en retour.

WALLACE TO TRUMP : I have a policy question for you, Sir. (J’ai une question politique pour vous, Monsieur)

RUBIO : Let’s see if he answers it. (Voyons s’il y répond)

TRUMP : I will. Don’t worry about it, Marco. Don’t worry about it. Don’t worry about it, Little Marco, I will. (Je vais y répondre. Ne t’en fais pas, Marco. Ne t’en fais pas. Ne t’en fais pas, Petit Marco, je vais y répondre)

RUBIO : All right, let’s hear it Big Donald. (Très bien, écoutons la réponse Grand Donald)

TRUMP : Don’t worry about it, Little Marco. (Ne t’en fais pas, Petit Marco)

Quant à Ted Cruz, Donald Trump s’adressera à lui en le qualifiant de « Lying Ted » (Ted qui ment). Charmants nouveaux surnoms.

  • Donald Trump face à ses incohérences

Les modérateurs de Fox News ont également joué un rôle important pour confronter Donald Trump à ses propres incohérences lors de ce débat.

Épisode 1 – Chris Wallace a déclaré en direct que certains chiffres avancés par Trump dans son plan pour l’économie n’avaient aucun sens. Exemple:

You say that Medicare could save $300 billion a year negotiating lower drug prices. But Medicare total only spends $78 billion a year on drugs. (Vous dites que Medicare pourrait économiser $300 milliards par an si l’on négociait des prix plus bas pour les médicaments. Mais Medicare ne dépense au total que $78 milliards par an pour l’achat de médicaments)

Trump aura un peu de mal à répondre, se contentant de dire qu’il ne parlait en réalité pas seulement des médicaments mais « d’autres choses ».

Épisode 2 – Le retour des vidéos de Fox News ! Souvenez-vous. Lors d’un précédent débat, Fox News avait diffusé en direct des extraits vidéos dévoilant des propos tenus par le passé par Marco Rubio et Ted Cruz au sujet de l’immigration. Le tout démontrait que les deux candidats avaient évolué sur la question, ce qui les avait forcés à se justifier. Fox News a cette fois utilisé la même arme contre Donald Trump. La vidéo diffusée montrait trois exemples de sujets sur lesquels Trump avait déclaré une chose puis son contraire, parfois à quelques jours d’intervalle seulement. C’est Megyn Kelly qui s’est chargée de cette partie du débat. Voici comment elle a présenté les choses.

Mr. Trump, one of the things people love about you is they believe you tell it like it is. But time and time again in this campaign, you have actually told the voters one thing only to reverse yourself within weeks or even sometimes days. We’ve teed up just three examples in a videotape, similar to those we used with Senator Rubio and Senator Cruz in the last debate. (Mr. Trump, l’une des choses que les gens aiment chez vous est qu’ils croient que vous dites les choses telles qu’elles sont. Mais tout au long de cette campagne, vous avez en réalité dit une chose aux électeurs pour dire ensuite l’inverse quelques semaines ou même parfois quelques jours plus tard. Nous avons rassemblé juste trois exemples dans une vidéo, similaire à celles que nous avions utilisées avec le Sénateur Rubio et le Sénateur Cruz lors du dernier débat)

Voici les trois exemples contenus dans la vidéo diffusée.

1 – Au sujet de l’intervention américaine en Afghanistan. On voit d’abord Donald Trump déclarer dans une interview que l’intervention en Afghanistan en 2001 était une erreur. Ensuite, dans une seconde interview, un journaliste cite les propos tenus par Donald Trump lors de la première interview et Trump nie avoir jamais tenu de tels propos. Il affirme n’avoir parlé d’erreur qu’en ce qui concerne l’Irak.

2 – Au sujet des réfugiés syriens. On voit d’abord Donald Trump déclarer qu’il n’aime pas tellement l’idée d’accueillir des syriens aux Etats-Unis mais qu’il s’agit ici d’une urgence humanitaire et que les Etats-Unis ont donc le devoir de les accueillir. Il ajoute que vivre en Syrie actuellement revient à vivre en enfer. Ensuite, on voit Donald Trump déclarer quelques jours plus tard qu’il ne faut pas accueillir de réfugiés car les Etats-Unis ont déjà assez de problèmes à régler comme ça.

3 – Au sujet de George W. Bush. On voit d’abord Donald Trump déclarer lors d’un récent débat que l’administration Bush a menti en prétendant qu’il y avait des armes de destruction massive en Irak, alors qu’ils savaient pertinemment qu’il n’y en avait pas. Quelques jours plus tard, interrogé à ce sujet lors d’une interview, Trump déclare: « Je ne sais pas s’il a menti ou non, il faudrait le lui demander ».

Trump a paru quelque peu ennuyé suite à la diffusion de cette vidéo. Il a tenté de se justifier tant bien que mal. En ce qui concerne les réfugiés par exemple, il a déclaré que lorsqu’on l’avait interrogé la première fois, il pensait qu’il ne s’agissait que d’un petit nombre de personnes. Il aurait ensuite appris qu’il s’agissait de milliers de personnes, ce qui l’aurait fait changer d’avis. Megyn Kelly fera remarquer que quelques jours seulement séparaient les deux déclarations. Finalement, la défense principale de Trump consistera à dire qu’il est normal de changer parfois d’avis et que pour réussir dans la vie, il faut savoir faire preuve de « flexibilité ».

I’ve never seen a successful person who wasn’t flexible. (Je n’ai jamais vu une personne qui a réussi et qui n’était pas flexible)

Marco Rubio interviendra pour déclarer :

There’s a difference between flexibility and telling people whatever you think you need to say to get them to do what you want them to do. (Il y a une différence entre la flexibilité et dire aux gens tout ce que vous pensez que vous avez besoin de leur dire pour faire en sorte qu’ils fassent ce que vous voulez qu’ils fassent)

Épisode 3 – Alors que les candidats discutaient du Second Amendement (qu’ils se sont tous engagés à protéger), Donald Trump a assuré qu’il était opposé à toute régulation du port d’armes. Il a ajouté que si les gens avaient été armés à Paris lors des attentats de novembre, il n’y aurait pas eu 130 morts. Bret Baier en a profité pour signaler à Donald Trump qu’il avait écrit dans l’un de ses livres qu’il était favorable à certaines restrictions, notamment l’interdiction de la vente d’armes de guerre.

BAIER : But in 2000, you wrote in your book, « I generally oppose gun control, but I support the ban on assault weapons ». (Mais en 2000, vous avez écrit dans votre livre, « Je suis généralement opposé au contrôle des armes, mais je soutiens l’interdiction des armes de guerre »)

TRUMP : I don’t support it anymore. I do not support the ban on assault. (Je ne la soutiens plus. Je ne soutiens pas l’interdiction des armes de guerre)

  • Trump et ses futures relations avec l’armée

Donald Trump a été interrogé sur le fait que plusieurs experts militaires et un ancien directeur de la CIA aient récemment déclaré que l’armée refuserait probablement d’obéir à certains de ses ordres si ceux-ci étaient illégaux. Le fait de s’en prendre aux familles des terroristes par exemple. Réponse de Trump ?

If I say do it, they’re going to do it. (Si je dis faites-le, ils le feront)

  • Marco Rubio critique l’attitude des Démocrates concernant le scandale de Flint

Le débat se déroulait au Michigan, état dans lequel se situe la ville de Flint. Dans cette ville, un scandale d’eau courante empoisonnée a récemment éclaté. Les autorités ont été accusées de ne pas avoir réagi suffisamment rapidement pour remédier au problème. Les deux candidats démocrates à la présidence, Hillary Clinton et Bernie Sanders, ont tous les deux déclaré que le gouverneur de l’état (le Républicain Rick Snyder) aurait probablement réagi beaucoup plus vite si le problème avait touché un riche quartier blanc plutôt qu’un quartier noir défavorisé. Bernie Sanders a même appelé à sa démission. Marco Rubio a réfuté cette interprétation des faits. Il a déclaré que tout le monde était concerné par ce qui s’était passé à Flint et qu’il s’agissait d’un échec terrible à tous les niveaux de pouvoir. Mais il a néanmoins défendu Rick Snyder qui a d’après lui assumé ses responsabilités. Et il a surtout critiqué l’instrumentalisation faite de cette affaire par les Démocrates. Pour lui, le fait que les Démocrates disent que les Républicains s’en fichent parce que c’est arrivé dans un quartier défavorisé est une simplification honteuse.

  • John Kasich et la liberté religieuse

Aux Etats-Unis, certains commerçants estiment qu’ils devraient pouvoir refuser de participer à des mariages homosexuels au nom de la liberté religieuse (ex: un boulanger qui refuserait de livrer un gâteau à un couple homosexuel pour son mariage). Interrogé à ce sujet, John Kasich a déclaré qu’il faudrait plus de tolérance de la part de tout le monde.

In our country, we need to learn to respect each other and be a little bit more tolerant for one another. (Dans notre pays, nous devons apprendre à nous respecter les uns les autres et à être un peu plus tolérants les uns vis-à-vis des autres)

John Kasich parlait bien ici des deux camps. Autrement dit, il trouvait dommage que des commerçants refusent de servir des clients gays. Le but d’un commerçant devrait être de faire son métier et de servir son client, quel qu’il soit. (Ndlr: lors du précédent débat, il avait même déclaré que si l’on refusait de servir un homosexuel, pourquoi pas aussi un divorcé?). Mais de la même façon, il a aussi déclaré que les homosexuels confrontés à ce genre de situation feraient mieux de s’adresser tout simplement à quelqu’un d’autre plutôt que d’intenter une action en justice.

  • Une séance de yoga ?

Voici sans doute le moment le plus insolite de la soirée. Cruz s’en prend encore une fois à Trump qui essaie de l’interrompre, en lui conseillant de respirer profondément.

CRUZ : Donald, please. I know it’s hard not to interrupt but try. Breathe. Breathe. Breathe. (Donald, s’il-te-plaît. Je sais que c’est difficile de ne pas interrompre mais essaie. Respire. Respire. Respire)

TRUMP : Lying Ted. (Ted qui ment)

CRUZ : You can do it. You can… Breathe. I know it’s hard. I know it’s hard. But just… (Tu peux le faire. Tu peux… Respire. Je sais que c’est difficile. Je sais que c’est difficile. Mais juste…)

RUBIO : When they’re done with the yoga, can I answer a question? Unbelievable. (Quand ils auront fini avec le yoga, je pourrai répondre à une question? Incroyable)

CRUZ : I really hope that we don’t see yoga on this stage. (J’espère vraiment que nous ne verrons pas de yoga sur ce plateau)

RUBIO en désignant Trump : Well, he’s very flexible, so you never know. (Et bien, il est très flexible, donc on ne sait jamais)

  • Les candidats s’engagent à soutenir le nominé républicain pour l’élection générale

En guise de dernière question, les modérateurs ont demandé aux candidats s’ils étaient toujours prêts à soutenir Donald Trump si ce dernier remportait les primaires. Marco Rubio, Ted Cruz et John Kasich ont tous les trois répondu par l’affirmative. De même, Donald Trump a déclaré qu’il soutiendrait le vainqueur des primaires si ce n’était pas lui.

L’INTERVIEW POST-DÉBAT DE DONALD TRUMP

Quelques secondes après la fin du débat, Donald Trump répondait aux questions du journaliste de Fox News Bill O’Reilly. Donald Trump s’est rapidement plaint du ton des questions de celui-ci.

TRUMP : You’ve become very negative, I do think. (Vous êtes devenu très négatif, je trouve)

O’REILLY : Me? Why? Why would I do that? (Moi? Pourquoi? Pourquoi je ferais cela?)

TRUMP : I don’t know. Who knows? You’ll have to ask your psychiatrist. But I think you’ve become very negative. (Je ne sais pas. Qui sait? Vous devriez demander à votre psychiatre. Mais je pense que vous êtes devenu très négatif)

O’REILLY : Toward you? (Envers vous?)

TRUMP : Yeah. (Oui)

Et un peu plus tard dans la même interview, Donald Trump déclarait déjà que tous les sondages indiquaient qu’il avait remporté le débat. Absurde quand on sait que l’interview se déroulait quelques secondes après la fin de celui-ci.

QUELQUES CHIFFRES

C’est Donald Trump qui a parlé le plus longtemps lors du débat (28 minutes), suivi de Ted Cruz (20 minutes), John Kasich (15 minutes) et Marco Rubio (14 minutes). Il est étonnant de voir figurer Rubio en dernière position mais il est probable qu’il se soit volontairement économisé. En effet, il était apparemment malade et s’exprimait avec une voix très enrouée. On se demandait même parfois s’il n’allait pas être victime d’une extinction de voix avant la fin du débat.

17 millions de téléspectateurs ont regardé le débat, ce qui en fait le quatrième débat républicain le plus regardé depuis le début de la campagne, et le plus regardé en 2016.

VAINQUEURS ET PERDANTS

Qui sont les vainqueurs et les perdants de ce débat ?

  • Les gagnants

Ted Cruz. Ted Cruz a été l’auteur d’une bien meilleure prestation que lors du débat précédent, où Marco Rubio avait tellement brillé qu’il lui avait totalement volé la vedette. Cruz a mené quelques attaques très efficaces contre Donald Trump, notamment lorsqu’il a expliqué pourquoi son refus de rendre public l’enregistrement du New York Times n’avait aucun sens s’il n’avait rien à cacher.

Fox News. Inutile de dire que Fox News n’a pas forcément bonne réputation. Mais force est de constater que son trio de modérateurs (Bret Baier, Chris Wallace & Megyn Kelly) a fait du bon boulot lors des trois débats qu’il a animés jusqu’ici. Ils n’hésitent pas à poser des questions qui mettent en danger les candidats ou à les contredire lorsqu’ils déclarent quelque chose d’incohérent. L’intervention de Chris Wallace concernant les chiffres absurdes avancés par Donald Trump était brillante. L’usage de vidéos plaçant les candidats face à leurs déclarations passées nous semble aussi être un outil très intéressant. On peut peut-être regretter que Trump en ait été la seule victime ici, mais Cruz et Rubio l’avaient été lors du débat précédent. Mention spéciale enfin à Megyn Kelly qui n’a pas hésité à poser des questions difficiles à Donald Trump malgré toutes les intimidations qu’elle a subies de sa part ces derniers mois.

John Kasich. Nous n’avions au départ pas l’intention de placer John Kasich dans nos vainqueurs. Sa prestation ne nous a en effet pas convaincus plus que cela. Mais étant donné que l’ensemble des médias américains l’ont placé dans leurs vainqueurs, il est possible que quelque chose nous ait échappé. La plupart des médias saluent surtout le fait que Kasich ait continué à diffuser un message positif et à refuser de s’en prendre personnellement à ses adversaires.

  • Les perdants

Donald Trump. Donald Trump est le grand perdant de la soirée. Il a été mis en difficulté par les attaques de ses adversaires et les questions des modérateurs. Il a eu beaucoup de mal à répondre à la plupart des accusations, se contentant d’agresser ses adversaires ou de déclarer qu’il était mieux positionné qu’eux dans les sondages. Ne parlons même pas de sa nouvelle manie d’appeler Marco Rubio « Little Marco » et Ted Cruz « Lying Ted » ou de sa remarque sur la taille de son sexe. Preuve qu’il était peut-être un peu perturbé à la fin du débat? Dans son closing statement, il a pour la première fois oublié de déclarer qu’il rendrait l’Amérique grande à nouveau (Make America Great Again). Ceci étant dit, une mauvaise performance lors d’un débat n’a pour l’instant jamais eu de lourdes conséquences pour Donald Trump dans les urnes.

Marco Rubio. Rubio a fait une excellente blague sur le yoga (à notre avis en tout cas). Mais sa prestation était plutôt décevante, surtout comparée à celle du débat précédent. Ses attaques contre Trump n’étaient pas forcément mauvaises mais elles avaient un goût de déjà vu. Et surtout, Rubio a passé tout son temps à attaquer Trump, à tel point qu’il n’a quasiment jamais parlé de ses propres idées ou de son propre programme électoral. À sa décharge, il était apparemment malade. Ce qui explique sans doute en partie son manque d’énergie.

Le Parti Républicain. Beaucoup d’électeurs attendent sans doute davantage d’un débat politique que de voir des candidats s’insulter ou faire des blagues sur la taille de leur sexe. Encore un débat qui n’a pas donné une très belle image du Parti Républicain.

 

 

 

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