L’actuel gouverneur de Louisiane est l’un des nombreux candidats à l’investiture républicaine. Portrait d’un fils d’immigrés indiens converti au catholicisme qui incarne l’aile la plus conservatrice de son parti.
SA CARRIÈRE POLITIQUE EN UN COUP D’ŒIL
Député à la Chambre des Représentants (2005-2008)
Gouverneur de Louisiane (depuis 2008)
SON PARCOURS
Piyush Jindal est né le 10 juin 1971 à Baton Rouge, capitale de la Louisiane. Ses parents, Amar et Raj, sont tous deux originaires de la province du Punjab, en Inde. Ils y ont grandi dans un milieu modeste. Amar vivait par exemple dans un village qui n’avait pas accès à l’électricité et a été le seul membre de sa famille à pouvoir faire des études. Il est devenu ingénieur. Amar et Raj se rencontrent à l’université et se marient en 1969. Deux ans plus tard, ils décident d’émigrer aux Etats-Unis. Leur premier fils, Piyush, voit le jour quatre mois seulement après leur arrivée en Louisiane. Dès l’âge de quatre ans, il demandera à ce qu’on l’appelle Bobby. Il aurait choisi ce surnom en référence au héros d’une série télévisée qu’il affectionnait. Bobby a un frère cadet, Nikesh, qui est aujourd’hui avocat. Les parents de Bobby et Nikesh se sont installés dans un quartier plutôt aisé et font tout pour que leurs deux enfants soient éduqués « à l’américaine ». Ils restent néanmoins des hindouistes pratiquants. Mais à l’adolescence, Bobby commence à lire la Bible en cachette. Alors qu’il est encore au lycée, il choisit de se convertir au catholicisme. Il se fera baptiser quelques années plus tard.
Bobby est un étudiant brillant. À seulement vingt ans, il sort doublement diplômé de la Brown University, en biologie et en politique publique. Excusez du peu. Il s’intéresse en réalité à la fois à la médecine et à la politique. Il est admis à la Harvard Medical School pour poursuivre des études de médecine mais il choisit finalement de s’orienter davantage vers la science politique et part poursuivre son cursus à l’Université d’Oxford, en Angleterre. Il y a été admis en tant que Rhodes Scholar*. Il obtient un master en sciences politiques et rédige sa thèse sur les politiques en matière de soins de santé.
*Le Rhodes Scholarship d’Oxford est un programme de troisième cycle rassemblant des étudiants étrangers soigneusement triés sur le volet. Autrement dit, un programme très élitiste et prestigieux.
En 1994, il rentre aux Etats-Unis et est immédiatement embauché par le célèbre cabinet de gestion McKinsey. Il n’y restera pas longtemps. En 1996, le nouveau gouverneur de Louisiane, Mike Foster, fait en effet appel à lui. Il le nomme à la tête de l’agence étatique en charge de la politique de santé. Autrement dit, Bobby occupe grosso modo l’équivalent d’un poste de Ministre de la Santé à l’échelle de la Louisiane. Il n’a que 24 ans.
En 1997, il se marie avec Supriya, qu’il a connue au lycée. Ils auront trois enfants : Selia, Shaan et Slade.
En 2001, le président George W. Bush lui offre un poste important au sein du Département de la Santé. Le choix du président est confirmé par un vote au Sénat, comme c’est le cas pour toutes les nominations à des postes fédéraux. Jindal devient alors l’un des adjoints et plus proches conseillers du Secrétaire d’Etat à la Santé. Mais les seconds rôles semblent ne plus lui suffire. Il démissionne en 2003 afin de se présenter à l’élection au poste de gouverneur de Louisiane. C’est évidemment un pari risqué puisqu’il ne s’est jusqu’ici jamais présenté à une élection. Il est battu par son opposante démocrate Kathleen Blanco qui remporte 52% des voix. Jindal ne s’avoue pas vaincu pour autant et se présente l’année suivante aux élections législatives. Cette fois, il remporte son pari et devient député à la Chambre des Représentants. En 2007, il se présente de nouveau à l’élection au poste de gouverneur de Louisiane et est élu avec 54% des voix.
En 2009, il est choisi par le Parti Républicain pour délivrer la réponse officielle du parti au premier State of the Union Address* du président Barack Obama. Ce qui prouve qu’il est désormais considéré comme l’une des étoiles montantes au sein du parti.
*Chaque année, au mois de janvier, le président des Etats-Unis prononce un discours sur l’état de l’Union devant le Congrès. Il y présente traditionnellement ses priorités pour l’année à venir. Ce discours est toujours très attendu et diffusé en direct à la télévision.
En 2011, les habitants de Louisiane le réélisent au poste de gouverneur en lui accordant pas moins de 66% des voix ! Mais depuis lors, sa cote de popularité a considérablement chuté. En juin dernier, un sondage ne le créditait plus que de 32% d’opinions favorables. Cela ne l’a pas empêché d’annoncer qu’il était candidat à la présidence.
DIFFICULTÉ À ASSUMER SES ORIGINES INDIENNES ?
Bobby Jindal a-t-il du mal à assumer ses origines indiennes? Certains défendent cette thèse, notamment au sein de la diaspora indienne vivant aux Etats-Unis. Ils mettent en évidence le fait qu’il ait désiré qu’on l’appelle Bobby au lieu de Piyush* ou qu’il ait rejeté la religion hindouiste pour se convertir au catholicisme.
*Jindal n’a jamais entamé de procédure administrative pour changer officiellement de nom. Légalement, il s’appelle donc toujours bien Piyush Jindal. Mais même lorsqu’il a prêté serment avant de prendre ses fonctions de gouverneur, il l’a fait en utilisant le nom de Bobby Jindal.
Ses détracteurs mentionnent aussi le fait que depuis 2008, l’un des portraits affichés par Jindal à l’intérieur de sa résidence de gouverneur le représente avec la peau très (pour ne pas dire trop) blanche.
Sans disposer d’une formation de psychologue, il nous semble difficile de juger si Jindal a vraiment un problème identitaire à régler. Mais ce qui est certain, c’est qu’il refuse de mettre en avant ses origines et de les transformer en argument électoral. Il répète régulièrement qu’il déteste être désigné par le terme Indian-American parce qu’il se considère – et veut être considéré – tout simplement comme un américain.
L’ANNONCE DE SA CANDIDATURE
Bobby Jindal a annoncé être candidat à la présidence le 24 juin dernier. Quelques heures avant de prononcer son discours, il publiait une vidéo d’environ deux minutes sur son compte Facebook. On l’y voyait annoncer à ses enfants qu’il avait pris la décision d’être candidat à la Maison Blanche. La vidéo était prise par une caméra qu’il avait cachée dans un arbre et qui filmait la terrasse où il était assis à une table avec sa femme et leurs trois enfants.
LE DISCOURS
Jindal a d’abord brièvement évoqué le cas de ses parents venus aux Etats-Unis parce qu’ils en avaient entendu parler comme d’un endroit où les gens étaient réellement libres et où les opportunités d’ascension sociale étaient réelles.
To them, America represented all that was good in the world. Where you could get ahead if you worked hard and played by the rules. A place where what matters is the content of your character, not the color of your skin, the ZIP code you were born in, or your family’s last name. (Pour eux, l’Amérique représentait tout ce qu’il y avait de bien dans le monde. Un endroit où vous pouviez avancer à condition de travailler dur et de respecter les règles. Un endroit où ce qui importe est le contenu de votre caractère, pas la couleur de votre peau, le code postal où vous êtes né, ou votre nom de famille)
On notera la référence au discours I Have A Dream de Martin Luther King.
Jindal a ensuite passé une bonne partie de son discours à se présenter comme un candidat différent des autres, y compris des autres candidats républicains. Il estime que la majorité des politiciens sont égoïstes et se préoccupent davantage de leur cote de popularité qu’autre chose. Ils préfèrent souvent éviter de s’attaquer aux vrais problèmes afin de rester populaires. Ce qui ne sera pas son cas car la popularité, dit-il, ne l’intéresse pas.
I’m not running for president to be somebody, I’m running for president to do something. (Je ne veux pas être président pour être quelqu’un, je veux être président pour faire quelque chose)
Il dit aussi être un vrai conservateur prêt à défendre ses valeurs et à exprimer son opinion même lorsque ses propos pourraient ne pas être jugés politiquement corrects. C’est notamment le cas en ce qui concerne la question de l’immigration. Il prétend être l’un des seuls candidats à avoir le courage de dire qu’il faut obliger les immigrants à s’intégrer et à adopter les valeurs américaines.
It’s not unreasonable to demand if you wanna immigrate to America, you must do so legally, you must be ready and willing to embrace our values, learn English, and roll up your sleeves and get to work. (Il n’est pas déraisonnable d’exiger que si vous voulez émigrer en Amérique, vous devez le faire légalement, vous devez être prêt et avoir la volonté d’adopter nos valeurs, d’apprendre l’anglais, et de retrousser vos manches et vous mettre au travail)
Jindal a également critiqué le fait que l’on divisait de plus en plus souvent les américains selon des critères d’ethnicité, de genre ou de revenus. Ce qu’il a en horreur.
I’m done with all this talk about hyphenated Americans. We are not Indian-Americans, African-Americans, Irish-Americans, rich Americans, or poor Americans. We are all Americans. (J’en ai assez de toutes ces discussions concernant les américains à trait d’union. Nous ne sommes pas indo-américains, afro-américains, irlando-américains, américains riches, ou américains pauvres. Nous sommes tous américains)
Jindal a terminé son discours en donnant ses quatre objectifs principaux s’il était élu à la Maison Blanche :
1 – Sécuriser les frontières
2 – Remplacer Obamacare par un autre plan de santé qui s’attacherait à réduire les coûts des soins de santé tout en rétablissant la liberté de choix du citoyen
3 – Réduire la taille du gouvernement fédéral et faire croître le secteur privé
4 – Restaurer le statut de leader de l’Amérique sur la scène internationale
LE TWEET
LOGO DE CAMPAGNE
Le logo de campagne de Bobby Jindal est un J majuscule aux couleurs du drapeau américain.
LE SITE WEB OFFICIEL
Comme tous les sites de candidats, le site de Bobby Jindal (bobbyjindal.com) contient une courte biographie retraçant les différentes étapes de sa carrière.
La rubrique intitulée Issues présente ses opinions sur divers sujets. Jindal en profite pour égratigner (beaucoup) Barack Obama au passage. Par exemple, concernant la question énergétique, il écrit en parlant du président : His dream of making everything use « green energy » is irrational and dangerous for our nation (Son rêve de faire utiliser de l’ « énergie verte » partout est irrationnel et dangereux pour notre nation). Par opposition, il se déclare favorable à l’exploitation des énergies fossiles qui permet de créer des emplois. Il dénonce aussi fortement la politique étrangère de Barack Obama et déclare que l’élimination de l’Etat Islamique doit être une priorité. Il défend également la position républicaine classique selon laquelle le gouvernement fédéral a pris trop d’envergure et est inefficace. Il aime d’ailleurs à rappeler qu’en Louisiane, il a diminué le budget de l’état de 26% et éliminé 30,000 emplois dans la fonction publique. Il déclare même que parmi les candidats républicains ayant occupé un poste de gouverneur, il est le seul à avoir véritablement réduit les dépenses de son état.

Il évoque également sa volonté de défendre la liberté religieuse ou de lutter contre l’avortement. En ce qui concerne l’avortement, il rappelle qu’il a fait passer une loi qui oblige désormais les médecins en Louisiane à pratiquer une échographie et à faire entendre les battements du cœur de leur bébé aux femmes avant de pratiquer un avortement.
Dans une autre rubrique intitulée Policy, Jindal détaille ses propositions dans cinq domaines :
– Plan de remplacement d’Obamacare
– Éducation
– Énergie
– Défense
– Plan de lutte contre les sanctuary cities (ces villes qui mettent en place une politique de tolérance vis-à-vis des immigrants illégaux, en interdisant notamment aux forces de police locales d’enquêter sur le titre de séjour des habitants)
Les propositions de Jindal sont détaillées. On a même accès pour chacune à un document PDF reprenant l’entièreté du plan proposé et faisant en moyenne entre 30 et 40 pages. Il ressort de leur lecture (que l’on soit par ailleurs d’accord ou non avec les solutions proposées) que Bobby Jindal a beaucoup réfléchi, qu’il maîtrise ses dossiers et qu’il a des propositions concrètes à mettre sur la table. Mais notre but n’étant pas d’entrer dans des détails trop complexes, nous nous contenterons ici de vous résumer les grandes lignes de ces cinq propositions.
1 – Le plan Jindal pour remplacer Obamacare
Jindal déclare être le seul candidat républicain à avoir un véritable plan pour remplacer Obamacare, là où les autres ne font que promettre de l’abroger. Or, Jindal estime qu’il est nécessaire d’abroger Obamacare mais aussi de réformer le système de santé américain d’une autre manière. Et la priorité doit être la diminution du coût des soins de santé. Le problème principal n’est pas que les gens ne veulent pas se soigner mais qu’ils y renoncent parce que cela coûte trop cher. Et Obamacare ne règle pas ce problème puisqu’il s’agit de forcer les gens à souscrire à une assurance maladie qui leur coûte elle aussi beaucoup trop cher. Jindal propose un ensemble de mesures (notamment toute une série de mesures fiscales assez complexes) qui devraient permettre de faire baisser le coût de l’assurance maladie et des soins pour le citoyen, tout en lui laissant la possibilité de souscrire à l’assurance de son choix.
2 – Propositions en matière d’éducation
Jindal veut que tous les enfants américains puissent avoir à terme accès à une éducation de qualité (il reconnaît que ce n’est pas le cas actuellement). Pour cela, il faut tout d’abord que les parents puissent choisir librement l’établissement dans lequel inscrire leurs enfants. Ce choix ne doit pas être effectué pour eux par le gouvernement. Jindal pense que les établissements scolaires seraient alors en concurrence pour attirer des élèves et cela ne ferait que les pousser à augmenter la qualité de leur enseignement. Petit à petit, le niveau global de tous les établissements devrait s’élever. Jindal veut aussi que l’éducation reste une matière gérée au niveau des états, et non par le gouvernement fédéral. Enfin, il propose d’accorder une attention particulière à la qualité des enseignants en les évaluant par exemple en termes de résultats obtenus.
3 – Propositions en matière d’énergie
En résumé, Jindal estime qu’il faut exploiter les ressources naturelles que l’Amérique a la chance de posséder. Cela permet une indépendance énergétique vis-à-vis des autres pays et la création d’emplois. Et cela n’empêche pas d’investir par ailleurs dans les énergies renouvelables, qui sont aussi un secteur de croissance.
4 – Propositions en matière de défense
Jindal fait partie de ceux qui pensent que l’Amérique a plus que jamais un rôle de leader à jouer sur la scène internationale.
We are the light of freedom in a dark world, and it’s time we start acting like it. I will not be intimidated from talking about the fact that radical Islam is evil and must be destroyed. (Nous sommes le phare de liberté dans un monde sombre, et il est temps que nous agissions comme tels. Je ne serai pas intimidé à l’idée de parler du fait que l’Islam radical est diabolique et doit être détruit)
Il ajoute qu’il ne faut pas lésiner sur les moyens alloués à l’armée car la défense des citoyens est le premier rôle du gouvernement fédéral. S’il faut faire des économies, c’est ailleurs. Il déclare vouloir consacrer 4% du PIB au budget de la défense (contre 2,9% actuellement).
5 – Proposition Partners in Crime pour lutter contre le phénomène des sanctuary cities
Jindal a des positions assez fermes concernant l’immigration illégale et d’après lui, les sanctuary cities empêchent de lutter efficacement contre cette dernière. Pour tenter de faire bouger les choses et de réduire leur nombre, il propose que les maires de ces villes soient tenus légalement responsables lorsqu’un immigrant en situation irrégulière commet un délit ou un crime dans leur ville. L’idée est qu’ils soient pénalement considérés comme complices du crime en question et que les victimes (ou les familles des victimes lorsqu’il s’agit d’un meurtre) puissent les poursuivre en justice.
Enfin, on trouve également sur le site web de Jindal un blog où il publie des communiqués de presse ou autres articles relatifs à l’actualité de la campagne. C’est par exemple là qu’il a publié début septembre la retranscription du discours où il attaquait Donald Trump, le qualifiant entre autres de personne narcissique et égocentrique. (Rappelez-vous, nous vous en parlions dans notre Weekly News Flash #5).
Bobby Jindal est également un adepte de l’utilisation des réseaux sociaux. Et la gestion de son compte Instagram (ce réseau social permettant de partager des photos) est particulièrement réussie. Il le décrit lui-même comme the official behind the scenes look at Bobby Jindal’s life and journey on the campaign trail (le regard officiel dans les coulisses de la vie et du voyage de Bobby Jindal sur les routes de la campagne). Les photos publiées nous donnent un bon aperçu de ce qu’est la vie d’un candidat en campagne pour la présidence, entre réunions publiques, débats télévisés, déplacements en avion et repas pris en voiture.
(Les quatre clichés ci-dessus sont tirés du profil Instagram de Bobby Jindal : Instagram.com/bobbyjindal)
UN REPRÉSENTANT DE L’AILE LA PLUS RELIGIEUSE ET LA PLUS CONSERVATRICE DU PARTI RÉPUBLICAIN
Tout comme Mike Huckabee, Rick Santorum ou Ted Cruz, Bobby Jindal est un candidat qui parle à ce que l’on appelle communément la « droite chrétienne ». Autrement dit, ces américains très croyants (le plus souvent protestants évangéliques, même s’ils peuvent aussi être catholiques comme c’est le cas de Santorum et Jindal) qui sont persuadés que l’Amérique est engagée sur le chemin du déclin moral. D’après eux, en banalisant la pratique de l’avortement et en légalisant le mariage entre personnes de même sexe, l’Amérique est en train de renier les valeurs religieuses et morales sur lesquelles elle a été fondée. Certains d’entre eux estiment que l’incarcération récente de Kim Davis (cette fonctionnaire du Kentucky ayant refusé de délivrer des certificats de mariage à des couples homosexuels parce que cela allait à l’encontre de ses convictions religieuses) est un premier pas vers une « criminalisation » des chrétiens exerçant librement leur foi. Bobby Jindal partage ces convictions.
Voici une anecdote révélatrice à ce propos. Lorsque le scandale Planned Parenthood a éclaté au cours de l’été*, Jindal en a tout de suite profité pour supprimer tous les fonds alloués par l’état de Louisiane à cette organisation. Et lorsqu’une manifestation citoyenne visant à protester contre sa décision a été organisée devant sa résidence de gouverneur, il a fait installer un écran géant qui diffusait les vidéos compromettantes aux manifestants !
*Petit rappel : Planned Parenthood est une organisation de planning familial qui procure des moyens de contraception aux femmes et réalise des avortements. Au début de l’été, des vidéos prises en caméra cachée par des militants anti-avortement montrent des responsables de l’organisation en train de discuter de la possibilité de revendre les organes des fœtus avortés, alors que la vente d’organes est un crime aux Etats-Unis. Tous les candidats républicains à la présidence s’étaient déclarés très choqués par ces vidéos et appellent depuis à ce que tous les financements fédéraux alloués à l’organisation soient supprimés. Les candidats démocrates, dont Hillary Clinton, défendent eux Planned Parenthood et estiment que les attaques républicaines font partie d’une stratégie visant à rendre de plus en plus difficile l’accès des femmes à l’avortement.
Autre anecdote. En 1994, Jindal a publié dans le magazine catholique New Oxford Review le récit d’une expérience étrange qu’il aurait vécue avec des amis alors qu’il était encore étudiant et s’apparentant à une sorte d’exorcisme (même s’il n’utilise pas ce mot). L’article s’intitule Beating a Demon : Physical Dimensions of Spiritual Warfare. Il explique que l’une de ses amies proches aurait commencé à avoir des comportements étranges et inexplicables peu après avoir appris être atteinte d’un cancer. Elle se serait notamment mise à sentir le soufre (odeur traditionnellement associée à la présence du diable). L’essentiel de l’article parle d’une réunion organisée entre amis afin de prier pour sa guérison. Lors de cette réunion, son amie se serait mise à émettre des sons étranges, à proférer des insultes et à convulser sur le sol. Ils auraient alors été plusieurs à la maintenir au sol tout en priant et en exhortant Satan de sortir de son corps. Jindal écrit même avoir ressenti une présence anormale dans la pièce et une douleur dans la poitrine l’empêchant de respirer correctement. Finalement, après avoir été forcée par plusieurs de ses camarades à réciter des passages de la Bible, son amie serait revenue à son état normal et aurait demandé ce qu’il venait de se passer, comme si elle ne se souvenait de rien.
Jindal incarne également l’aile la plus conservatrice du Parti Républicain sur bien d’autres sujets. Prenons un exemple. Les Républicains sont traditionnellement partisans d’un rôle limité de l’Etat dans les affaires économiques et sociales. Ils partagent la croyance qu’il faut limiter les prérogatives du gouvernement fédéral et réduire les dépenses de l’Etat. Mais ce credo est appliqué plus ou moins radicalement par les élus républicains au pouvoir. En tant que gouverneur, Jindal a agi de manière drastique en réduisant le budget de l’état de Louisiane de 26% et en supprimant 30,000 postes de fonctionnaires. Il va également jusqu’à qualifier régulièrement les Démocrates de « socialistes » qui sont en train de détruire le rêve américain en rendant les gens dépendants du gouvernement. Il fait aussi partie de ceux qui estiment que les députés républicains au Congrès ne défendent pas suffisamment les valeurs conservatrices et font trop de compromis avec les Démocrates.
Enfin, Jindal a fait de la phrase Immigration without assimilation is invasion (L’immigration sans assimilation est une invasion) l’un des maîtres-mots de sa campagne. En janvier 2015, lors d’un déplacement à Londres, il avait même déclaré qu’il y avait dans plusieurs villes européennes (dont la capitale britannique) des no-go zones dominées par la Charia. Autrement dit, il estime que certains musulmans ont refusé de s’intégrer et d’adopter les valeurs des sociétés européennes qui les ont accueillis. Et il redoute que la même situation ne se reproduise aux Etats-Unis.
CONCLUSION
Bobby Jindal n’a pratiquement aucune chance de remporter l’investiture républicaine. Il incarne l’aile la plus conservatrice de son parti alors que le candidat remportant l’investiture est généralement quelqu’un de plus modéré, capable de rassembler un électorat plus vaste. De plus, il est clairement concurrencé par Mike Huckabee, Rick Santorum et Ted Cruz et manque encore de reconnaissance au niveau national. D’ailleurs, depuis le début de sa campagne, il n’a jamais réussi à décoller dans les sondages. Lors des deux débats télévisés ayant déjà eu lieu, il faisait à chaque fois partie des candidats relégués sur la scène du Happy Hour Debate. Certains bookmakers pensent même qu’il pourrait être le prochain candidat républicain à mettre un terme à sa campagne.