WEEKLY NEWS FLASH #70

La Russie, encore et toujours. Donald Trump accusant Barack Obama de l’avoir mis sur écoute. La recherche d’une loi cachée au Capitole. Et bien plus encore. Résumé d’une semaine complètement folle à Washington. 

L’ÉVÉNEMENT DE LA SEMAINE

Le discours de Donald Trump devant le Congrès. Pour tout savoir à ce sujet, lisez notre article Donald Trump endosse son costume de président devant le Congrès. Si ce discours a été salué par la grande majorité des observateurs, la suite de la semaine a été bien plus mouvementée pour le président des Etats-Unis. Vous allez rapidement le constater.

LE FEUILLETON DE LA SEMAINE

Mercredi 1er mars, au lendemain du bon discours de Donald Trump devant le Congrès, le Washington Post révèle que Jeff Sessions a rencontré l’ambassadeur russe Sergey Kislyak à deux reprises en 2016. Or, il ne l’a pas mentionné lors de son audition devant le Sénat au mois de janvier. Pour bien comprendre, remontons la ligne du temps.

Août 2015. Jeff Sessions, sénateur de l’Alabama, participe à un meeting de Donald Trump organisé dans son état. Donald Trump n’est alors candidat à la présidence que depuis deux mois et Sessions est le premier élu républicain important qui accepte d’apparaître à ses côtés. Il enfilera même une casquette Make America Great Again.

Février 2016. Jeff Sessions annonce officiellement son soutien à Donald Trump pour les primaires républicaines. Il devient l’un de ses conseillers de campagne en matière de politique étrangère.

18 juillet 2016. Dans le cadre de la Convention Nationale Républicaine, Jeff Sessions participe à un débat organisé par la Heritage Foundation, un puissant think tank conservateur, sur le futur des relations entre les Etats-Unis et l’Europe. Plusieurs ambassadeurs, dont l’ambassadeur russe à Washington, Sergey Kislyak, participent également à ce débat. À la fin de la réunion, Sessions s’entretient avec plusieurs ambassadeurs, dont Kislyak. C’est la première des deux rencontres entre les deux hommes.

8 septembre 2016. Jeff Sessions rencontre Kislyak pour la deuxième fois. Il le reçoit dans son bureau du Sénat pour un entretien.

8 novembre 2016. Donald Trump remporte l’élection présidentielle.

18 novembre 2016. Donald Trump nomme Jeff Sessions au poste d’Attorney General (Ministre de la Justice).

10 janvier 2017. Jeff Sessions passe son audition devant le comité compétent du Sénat. Le sénateur démocrate Al Franken lui demande ce qu’il ferait, en tant que Ministre de la Justice, s’il apprenait que des conseillers de Donald Trump avaient été en contact avec le gouvernement russe pendant la campagne électorale. Jeff Sessions répond:

I’m not aware of any of those activities. I have been called a surrogate at a time or two in that campaign and I did not have communications with the Russians. (Je ne suis pas au courant de telles activités. J’ai parfois été qualifié de représentant durant cette campagne et je n’ai eu aucune communication avec les russes)

17 janvier 2017. Après que le Washington Post ait révélé l’existence des discussions entre Michael Flynn et Sergey Kislyak – révélations qui contraindront finalement Flynn à la démission -, le sénateur démocrate Patrick Leahy adresse une série de questions écrites supplémentaires à Jeff Sessions. L’une d’entre elles est la suivante:

Several of the President-Elect’s nominees or senior advisers have Russian ties. Have you been in contact with anyone connected to any part of the Russian government about the 2016 election, either before or after Election Day? (Plusieurs personnes nommées par le président-élu et plusieurs de ses conseillers ont des liens avec la Russie. Avez-vous été en contact avec quelqu’un ayant un lien avec le gouvernement russe au sujet de l’élection de 2016, que ce soit avant ou après le jour de l’élection?)

La réponse de Jeff Sessions est brève  et sans ambigüité : « Non ».

8 février 2017. Le Sénat vote en faveur de la nomination de Jeff Sessions (52-47). Tous les Démocrates, à l’exception de Joe Manchin, votent contre. Sessions prête serment et prend ses fonctions d’Attorney General.

1er mars 2017. Nous en arrivons à l’actualité de cette semaine. Le Washington Post révèle donc dans un article que Jeff Sessions a rencontré Sergey Kislyak à deux reprises en 2016. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, la première rencontre a eu lieu lors de la Convention Nationale Républicaine en juillet et la seconde a eu lieu dans le bureau de Sessions au Sénat en septembre. Or, comme nous l’avons vu, Sessions n’a pas mentionné l’existence de ces rencontres lors de son audition devant le Sénat au mois de janvier.

Pour les Démocrates, Sessions a menti sous serment. Nancy Pelosi et Chuck Schumer, les leaders de la minorité démocrate à la Chambre et au Sénat, réclament immédiatement sa démission.

Jeff Sessions se défend en affirmant qu’il n’a jamais rencontré d’officiels russes pour discuter de la campagne électorale de 2016. Or, d’après lui, les questions posées lors de son audition portaient sur ce point précis. Il n’a donc pas menti. Il assure que ses deux rencontres avec Kislyak faisaient partie de son job de sénateur et n’étaient pas liées à son statut de conseiller de Donald Trump. Une porte-parole du Département de la Justice a même précisé que Jeff Sessions avait rencontré 25 ambassadeurs étrangers en 2016 dans le cadre de sa fonction de sénateur. Sa rencontre avec Kislyak n’avait donc rien de particulier ni de scandaleux. Fin de l’histoire.

Les Républicains du Congrès accordent quant à eux le bénéfice du doute à leur ancien collègue. Ils déclarent lui faire confiance et penser qu’il n’a rien fait de mal. Ils rappellent qu’il est courant pour un sénateur de rencontrer des ambassadeurs étrangers*. Contrairement aux Démocrates, les Républicains n’accusent pas Sessions d’avoir menti sous serment et ne réclament pas sa démission. En revanche, ils reconnaissent qu’il aurait mieux fait d’évoquer ses rencontres avec Kislyak lors de son audition pour éviter tout malentendu. Certains lui demandent également de se récuser de toute enquête portant sur les liens entre l’équipe de campagne de Donald Trump et la Russie, afin de démontrer sa bonne foi au peuple américain.

*Politifact a interrogé plusieurs experts en matière de politique étrangère et tous sont d’accord pour dire que les rencontres entre sénateurs et ambassadeurs étrangers sont en effet monnaie courante à Washington. Les ambassadeurs en poste dans la capitale américaine n’hésitent pas à faire du lobbying auprès des membres du Congrès. Cela fait partie de leur job. De même, les députés et sénateurs ont totalement le droit de rencontrer les ambassadeurs étrangers pour s’informer. Cela serait même une bonne chose en matière de séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif aurait ainsi plusieurs sources d’informations et ne devrait pas uniquement se baser sur les informations délivrées par la Maison Blanche au moment de prendre des décisions importantes en matière de politique étrangère. Jeff Sessions n’a donc a priori rien fait d’illégal en recevant Sergey Kislyak dans son bureau. Le problème est qu’il n’en ait pas parlé lors de son audition.

2 mars 2017. Au lendemain des révélations du Washington Post et sous la pression, Jeff Sessions organise une conférence de presse. Il annonce qu’il se récuse de toute enquête en cours ou à venir portant sur la campagne électorale de 2016. Il refuse en revanche de démissionner, affirmant toujours qu’il n’a rien à se reprocher.

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Il est possible que Jeff Sessions dise la vérité et n’ait véritablement rien à se reprocher. Peut-être a-t-il vraiment rencontré Kislyak dans le cadre de son job de sénateur, au même titre que d’autres ambassadeurs. Peut-être n’ont-ils pas évoqué la campagne électorale en cours et le fait que la Russie menait à l’époque une campagne de piratage contre le Parti Démocrate et tentait ainsi d’influencer le résultat de l’élection présidentielle. Mais on peut aisément comprendre pourquoi les doutes sont si nombreux. S’il n’avait rien à se reprocher, pourquoi Jeff Sessions n’a-t-il pas parlé de son rendez-vous avec Kislyak lors de son audition devant le Sénat? Pour reprendre les mots du sénateur démocrate Chris Murphy,

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Traduction: Il n’est pas illégal pour un sénateur de parler avec l’ambassadeur russe. Alors pourquoi mentir sous serment à ce sujet? Cela n’a aucun sens, à moins que…

De plus, les rencontres entre Kislyak et Sessions ne sont qu’un élément de plus venant compléter un tableau troublant de liens avérés ou supposés entre l’entourage de Donald Trump et la Russie. Ci-dessous, un diagramme des liens avérés (lignes pleines) ou supposés (lignes en pointillés) entre l’entourage de Donald Trump et différentes entités russes.

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Source: Washington Post

Quelques précisions supplémentaires à propos des trois entités russes prises en considération dans ce diagramme.

Amb. Kislyak = Sergey Kislyak, l’ambassadeur russe en poste à Washington.

Russian government = Vladimir Poutine, l’ensemble des agences gouvernementales russes et/ou Russia Today, chaîne de télévision russe téléguidée par le Kremlin. On sait par exemple que Michael Flynn a participé à un dîner de gala organisé par Russia Today à Moscou en 2015. Il était assis à la même table que Vladimir Poutine lors de ce dîner.

Russian businesses = Entreprises ou hommes d’affaires russes.

En ce qui concerne Donald Trump, les liens avérés qui le relient au gouvernement russe ne sont que les conversations téléphoniques qu’il a eues avec Vladimir Poutine depuis son arrivée à la Maison Blanche. Rien d’anormal jusque-là. Rien ne permet pour l’instant de prouver qu’il ait été en contact avec les russes pendant la campagne. Ses liens avec des entreprises russes ne sont que supposés mais on sait que son fils, Donald Trump Jr., a bel et bien fait des affaires en Russie pour le compte de la Trump Organization. Il est donc fort probable que Donald Trump ait lui aussi fait des affaires en Russie. Ses déclarations de revenus permettraient certainement de répondre à bon nombre de questions à ce sujet, mais il a refusé de les publier pendant la campagne, une première historique pour un candidat à la présidence. Ce qui ne fait qu’alimenter les soupçons.

3 mars 2017. Donald Trump semble furieux que les liens supposés entre sa campagne et la Russie soient à nouveau au cœur de l’actualité et aient fait oublier son discours devant le Congrès. D’après la presse, qui cite toujours des sources anonymes au sein de la Maison Blanche, il serait également furieux que Jeff Sessions ait pris la décision de se récuser sans lui demander son avis. Et que fait Donald Trump lorsqu’il est en colère? Il se lâche sur Twitter. Le président publie un tweet dans lequel il s’en prend à Chuck Schumer, le leader des Démocrates au Sénat, qui a réclamé la démission de Sessions. Le tweet contient une photo de Schumer mangeant un donut en compagnie de Vladimir Poutine. Le président réclame que la justice enquête sur les liens unissant Schumer à la Russie !

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Traduction: Nous devrions entamer une enquête immédiate sur les liens de Chuck Schumer avec la Russie et Poutine. Un hypocrite complet!

Petite précision au sujet de la photo. Elle a été prise en 2003 à New York, lors de l’inauguration de la première station essence Lukoil dans la ville. La rencontre n’était donc ni privée ni secrète. Autrement dit, pas de quoi justifier une enquête.

Et puisque l’on parle d’enquête, faisons le point sur les enquêtes en cours au sujet des liens Trump/Russie. Pour l’instant, plusieurs comités de la Chambre et du Sénat enquêtent sur les activités russes pendant la campagne électorale de 2016. C’est aussi le cas du FBI. Les conclusions de ces enquêtes devraient être rendues publiques une fois qu’elles seront terminées. Mais pour les Démocrates, ce n’est pas suffisant. Ils voudraient qu’une commission d’enquête parlementaire spéciale soit créée, comme cela avait été le cas après le 11 septembre 2001 ou, plus récemment, pour l’affaire Benghazi. Le Congrès devrait évidemment voter en faveur de la mise en place d’une telle commission et, pour le moment, les Républicains estiment que ce n’est pas nécessaire. Enfin, certains Démocrates réclament également qu’un procureur spécial et totalement indépendant soit nommé et mène sa propre enquête, parallèle à celle du Congrès. C’est ce qu’il s’était passé pour le scandale du Watergate. Là aussi, les Républicains s’y opposent jusqu’à présent.

LES ACCUSATIONS DE LA SEMAINE

Samedi matin, depuis le Mar-a-Lago, sa résidence de Floride où il passait une fois de plus le week-end, Donald Trump a publié plusieurs nouveaux tweets. Il y accuse son prédécesseur, Barack Obama, d’avoir mis les téléphones de la Trump Tower sur écoute pendant la campagne électorale !!!

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Traduction: Comment le président Obama a-t-il pu tomber si bas au point de mettre mes téléphones sur écoute pendant la période sacrée du processus électoral. C’est Nixon/Watergate. Un homme mauvais (ou malade)!

Le président n’a fourni aucune preuve de ce qu’il avance et personne à la Maison Blanche ne semblait savoir qu’il avait l’intention de publier ces tweets. Leur publication coïncide curieusement avec celle d’un article de Breitbart accusant l’administration Obama d’actes similaires. Donald Trump s’informerait-il vraiment sur Breitbart plutôt qu’auprès des services de renseignement? Si c’est le cas, c’est évidemment plutôt préoccupant.

Pour en revenir aux accusations de mise sur écoute, trois scénarios sont envisageables. Nous vous laisserons décider lequel vous semble le plus plausible.

1 – Donald Trump n’a jamais été mis sur écoute. Dans ce cas, les accusations contenues dans ses tweets seraient totalement mensongères. Ce qui serait très inquiétant puisque cela signifierait que le président des Etats-Unis propage volontairement une théorie du complot. (Cela ne serait évidemment pas la première fois que Donald Trump agirait de la sorte. Rappelez-vous du certificat de naissance d’Obama ou du père de Ted Cruz impliqué dans l’assassinat de Kennedy).

2 – Donald Trump dit la vérité. Il a bien été mis sur écoute par Barack Obama. Cela signifierait que le président Obama a agi illégalement. En effet, le président des Etats-Unis ne peut pas ordonner la mise sur écoute d’un citoyen. Seule la justice détient ce pouvoir. En contournant le pouvoir judiciaire et en parvenant, d’une manière ou d’une autre, à faire placer les téléphones de la Trump Tower sur écoute, Barack Obama serait responsable d’un crime comparable à celui de Nixon dans l’affaire du Watergate. On ne sait jamais… Toutefois, rappelons que Donald Trump n’a pour l’instant apporté aucune preuve de ce qu’il avance. Barack Obama, par la voix de son porte-parole, a tout de même tenu à démentir.

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Traduction: L’une des règles cardinales de l’administration Obama était qu’aucun membre de la Maison Blanche n’intervienne dans aucune enquête indépendante menée par le Département de la Justice. En raison de cette pratique, ni le Président Obama ni aucun autre membre de la Maison Blanche n’a jamais ordonné la mise sous surveillance d’aucun citoyen américain. Toute suggestion du contraire est tout simplement fausse.

3 – Donald Trump a bien été placé sur écoute dans le cadre d’une procédure judiciaire, et non par Barack Obama comme il l’affirme. Dans ce cas, cela signifierait que la justice (probablement le FBI) aurait eu assez d’éléments probants pour justifier une telle mise sur écoute. Et on en reviendrait alors probablement à la Russie. Un ancien agent des services de renseignement expliquait en effet au Washington Post que la mise sur écoute d’un citoyen ne peut être autorisée que lorsque celui-ci est suspecté d’avoir commis un crime ou d’être un agent à la solde d’une puissance étrangère.

LA QUERELLE INSIGNIFIANTE DE LA SEMAINE

Lors de son discours devant le Congrès quelques jours plus tôt, Donald Trump avait déclaré que « le temps des querelles insignifiantes est derrière nous ». Samedi, juste après avoir accusé Barack Obama de l’avoir mis sur écoute, il publiait pourtant le tweet suivant au sujet d’Arnold Schwarzenegger. Ce dernier avait annoncé la veille qu’il ne rempilerait pas pour une nouvelle saison de l’émission The Apprentice, autrefois animée par Donald Trump.

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Traduction: Arnold Schwarzenegger ne quitte pas The Apprentice de son plein gré, il a été viré à cause de ses mauvaises (pathétiques) audiences, pas à cause de moi. Une triste fin pour une grande émission.

Schwarzie a évidemment répliqué.

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Traduction: Tu devrais penser à recruter un nouveau rédacteur de blagues ou un vérificateur de faits.

THE TRUMP TRANSITION STORY

Les nominations de quatre nouveaux membres du Cabinet ont été confirmées par le Sénat cette semaine.

Wilbur Ross, Secrétaire au Commerce (72-27).

Ryan Zinke, Secrétaire à l’Intérieur (68-31). Seize Démocrates ont voté en faveur de la nomination de Zinke, qui sera notamment en charge de la gestion des parcs nationaux américains. Natif d’une petite ville du Montana située non loin du Glacier National Park, Zinke n’a pas hésité à se rendre au siège du Département de l’Intérieur (en plein Washington, D.C.) à cheval pour son premier jour de travail ! Il portait évidemment un jeans et un chapeau de cow-boy.

Zinke a aussi adressé une lettre à tous les employés du Département. Il y parle de son amour pour les parcs nationaux et de sa volonté de les protéger. Lors de son audition devant le Sénat, il s’est déclaré opposé à toute privatisation de terres détenues par l’état fédéral. Une idée pourtant défendue par certains conservateurs, notamment ceux venus de l’Ouest américain, où un très grand pourcentage du territoire appartient à l’état. Zinke affirme aussi vouloir se battre pour qu’une bonne partie du budget massif que Donald Trump veut dégager pour son plan d’infrastructures soit attribuée aux parcs nationaux. Il s’engage aussi à protéger les intérêts des tribus indiennes. Pour ceux qui voudraient lire la lettre de Zinke (en anglais), cliquez ici.

Ben Carson, Secrétaire au Logement et à l’Urbanisme (58-41) et Rick Perry, Secrétaire à l’Energie (62-37). Notons que six Démocrates ont voté en faveur de la confirmation de Ben Carson et dix en faveur de la confirmation de Rick Perry.

LE CHIFFRE DE LA SEMAINE

54 milliards $$$. Donald Trump souhaite augmenter le budget alloué à la Défense de 54 milliards de dollars en 2018. En contrepartie, des économies d’un montant équivalent devront être réalisées par d’autres agences gouvernementales. Le Département d’Etat et l’Agence de Protection de l’Environnement verraient notamment leur budget diminuer considérablement. Du moins, si la proposition de budget de la Maison Blanche était approuvée par le Congrès, ce qui n’est pas certain. Pour l’instant, rien n’est encore fait. Et pour cause. Parmi les économies drastiques que la Maison Blanche voudrait imposer au Département d’Etat figure la réduction de l’aide au développement. Or, de nombreux Républicains estiment qu’il ne faut surtout pas réduire le budget consacré aux programmes d’aide au développement. Voyez, par exemple, ce tweet de Marco Rubio.

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Traduction: L’aide au développement n’est pas de la charité. Nous devons faire en sorte qu’elle soit correctement utilisée, mais elle représente moins d’1% du budget et est cruciale pour notre sécurité nationale.

L’armée ne semble pas non plus convaincue par l’idée de réduire le budget du Département d’Etat. Plus de 120 anciens militaires de haut rang ont adressé une lettre à la Maison Blanche et au Congrès pour leur faire part de leurs craintes. D’après les signataires, le rôle du Département d’Etat est indispensable pour prévenir les conflits et réduire les risques de devoir envoyer un jour des hommes au combat. James Mattis, aujourd’hui Ministre de la Défense, avait lui-même déclaré en 2013 devant le Congrès:

If you don’t fund the State Department fully, then I need to buy more ammunition. (Si vous ne financez pas correctement le Département d’Etat, alors je dois acheter plus de munitions)

LES E-MAILS DE LA SEMAINE

Scandale des e-mails, le retour ! L’Indianapolis Star a révélé que Mike Pence, actuel vice-président des Etats-Unis, avait utilisé son adresse e-mail privée pour certaines tâches professionnelles lorsqu’il était gouverneur de l’Indiana. Précisons que la loi de l’Indiana n’interdit pas au gouverneur d’utiliser son adresse personnelle à des fins professionnelles. On peut donc reprocher son imprudence à Mike Pence mais il n’a pas enfreint la loi.

D’anciens membres de l’équipe de campagne d’Hillary Clinton n’ont pas tardé à comparer la situation de Mike Pence à celle de leur championne, dénonçant l’hypocrisie du vice-président, qui avait fortement critiqué la candidate démocrate pour son usage d’un serveur privé lorsqu’elle était Secrétaire d’Etat. Pourtant, la situation de Mike Pence n’est pas tout à fait identique à celle d’Hillary Clinton. Faisons rapidement le point.

Comme Hillary Clinton, Mike Pence a utilisé une adresse e-mail personnelle pour certaines de ses correspondances professionnelles. MAIS

1 – Il disposait également d’une adresse professionnelle. Hillary Clinton ne disposait quant à elle que d’une adresse personnelle, alors que le Département d’Etat recommandait vivement à ses employés d’utiliser exclusivement une adresse gouvernementale pour toutes leurs correspondances professionnelles.

2 – L’adresse personnelle de Mike Pence était hébergée sur un serveur de type Yahoo ou Hotmail. L’adresse e-mail personnelle d’Hillary Clinton était quant à elle hébergée sur un serveur privé qu’elle avait fait installer à son propre domicile.

Autre point commun entre l’usage d’une adresse personnelle par Hillary Clinton et Mike Pence: la vulnérabilité potentielle face aux piratages informatiques. On ignore si le serveur privé d’Hillary Clinton a été piraté. Lorsqu’il a présenté les conclusions de son enquête, le directeur du FBI a indiqué que c’était une possibilité mais que rien ne permettait de le prouver. Le compte personnel de Mike Pence a quant à lui bien été piraté lorsqu’il était gouverneur. Certains de ses contacts avaient reçu à l’époque un message qui leur était soi-disant adressé par Mike Pence et son épouse. Ils déclaraient avoir été agressés aux Philippines et avoir besoin d’argent. Arnaque classique.

Enfin, en ce qui concerne l’archivage, Mike Pence assure que tous les e-mails qu’il a échangés sur son adresse personnelle à des fins professionnelles ont été conservés et transmis aux archives de l’état de l’Indiana, comme le veut la loi. Hillary Clinton avait quant à elle effacé des milliers d’e-mails soi-disant à caractère privé avant de transmettre le reste au Département d’Etat. Or, l’enquête du FBI a démontré que plusieurs de ces e-mails effacés avaient bien un caractère professionnel et contenaient même parfois des informations classifiées. Hillary Clinton avait pourtant affirmé qu’elle n’avait jamais partagé aucune information classifiée par e-mail. En tant que gouverneur, Mike Pence n’avait évidemment pas accès à des informations aussi hautement confidentielles.

LE SILENCE DE LA SEMAINE

Nous vous parlions déjà la semaine dernière du curieux silence du Secrétaire d’Etat, Rex Tillerson. Cette semaine, le Département d’Etat publiait son rapport annuel sur le respect des droits de l’homme (Human Rights Report). Habituellement, le Secrétaire d’Etat prononce un discours et organise une conférence de presse pour présenter officiellement ce rapport. Ici, il a seulement été publié sur le site web du Département d’Etat, sans que Rex Tillerson ne prenne la parole.

Pour certains activistes, c’est la preuve que l’administration de Donald Trump n’accorde pas beaucoup d’importance à la thématique du respect des droits de l’homme. Quelques jours avant la publication du rapport, la directrice de Human Rights Watch déclarait ainsi:

If Secretary Tillerson is absent from the State Department’s annual Human Rights Report release, he will reinforce the message to governments, rights activists and at-risk minorities that the State Department might also be silent on repression, abuse, and exploitation. (Si le Secrétaire Tillerson ne participe pas à la publication annuelle du rapport sur les droits de l’homme, il renforcera le message auprès des gouvernements étrangers, des activistes et des minorités à risque que le Département d’Etat pourrait rester silencieux face à la répression, à la maltraitance et à l’exploitation)

Marco Rubio, qui avait finalement voté en faveur de la nomination de Tillerson après l’avoir critiqué durant son audition, se plaignait aussi sur Twitter.

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Traduction: Pour la première fois depuis longtemps le rapport du Département d’Etat sur les droits de l’homme ne sera pas présenté par le Secrétaire d’Etat. J’espère qu’il reviendra sur sa décision.

LA PROPOSITION DE LOI DE LA SEMAINE

En parlant de Marco Rubio, sachez qu’il a introduit une proposition de loi visant à renommer la rue dans laquelle se trouve l’ambassade russe à Washington au nom de Boris Nemtsov, cet opposant à Vladimir Poutine assassiné en 2015.

L’HOMME DE LA SEMAINE

George W. Bush. L’ancien président, plutôt discret depuis son départ de la Maison Blanche, était sur tous les plateaux de télévision cette semaine. Il faisait la promotion de son nouveau livre, intitulé Portraits of Courage. On y retrouve des portraits de vétérans victimes de blessures de guerre qu’il a peints. Chaque portrait est accompagné de l’histoire du vétéran en question. Il s’agit d’un livre-hommage qui a aussi pour but de sensibiliser les vétérans à la question du syndrome post-traumatique. Trop de vétérans qui rencontrent des difficultés lors de leur réinsertion dans la vie courante n’osent pas en parler et demander de l’aide, parce que c’est encore trop souvent considéré comme un signe de faiblesse. Bush voudrait contribuer à faire évoluer les mentalités à ce sujet. Lors d’une interview, il a déclaré que le message principal du livre était le suivant: « Notre message est qu’il est courageux d’en parler et de demander de l’aide ». Tous les revenus générés par la vente du livre seront reversés au George W. Bush Institute, qui s’occupe de l’aide aux vétérans.

Si l’ancien président a avant tout parlé de peinture et de son livre (cf. vidéo ci-dessus), il n’a évidemment pas pu échapper aux questions relatives à Donald Trump. Lors de son interview au Today Show, il a semblé critiquer le président. Interrogé sur le fait que Donald Trump ait qualifié la presse d’ « ennemie du peuple », Bush a ainsi déclaré:

I consider the media to be indispensable to democracy. (Je considère la presse comme indispensable à la démocratie)

Il a ajouté que le pouvoir pouvait être addictif et qu’il était important que les médias soient là pour dénoncer les éventuels abus de ceux qui le détiennent. Il a aussi affirmé:

I am for an immigration policy that’s welcoming and upholds the law. (Je suis favorable à une politique d’immigration accueillante et conforme à la loi)

Dans l’émission Jimmy Kimmel Live, George W. Bush a aussi affirmé qu’il n’avait jamais été dérangé par les imitations que les humoristes pouvaient faire de lui et qu’il avait toujours apprécié participer au White House Correspondents’ Dinner. « Le meilleur humour est lorsque vous vous moquez de vous-même », a-t-il déclaré.

L’HISTOIRE FOLLE DE LA SEMAINE

C’est lorsque l’on croit que la politique américaine ne pourra plus nous surprendre qu’elle bat des records de surréalisme. Voici l’histoire formidable de la recherche d’un texte de loi caché au Capitole !

Les Républicains de la Chambre des Représentants travaillent actuellement sur leur proposition de loi de remplacement de l’Obamacare. La copie du texte est conservée sous clé dans un endroit secret. Il est probable que cette décision ait été prise afin d’éviter toute fuite dans la presse. Pour l’instant, ni les Démocrates ni les Républicains du Sénat (!) n’ont pu voir ce que contient la proposition de loi. Jeudi dernier, le sénateur républicain Rand Paul, furieux de ne pas avoir accès au texte, annonce qu’il se rend à la Chambre pour réclamer une copie. Une bonne manière sans doute aussi de faire parler de lui…

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Traduction: Je me rends dans l’endroit sécurisé où ils gardent la loi de la Chambre sur l’Obamacare. Je vais réclamer une copie pour le peuple américain.

Lorsque Rand Paul arrive devant la Room H-157, où il croit savoir que des députés sont réunis pour examiner le texte, on lui interdit d’entrer.

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Traduction: Le sénateur Paul essayant d’entrer dans la pièce où se trouve la loi. On lui refuse l’entrée.

Rand Paul demande alors à ce qu’on lui apporte au moins le texte pour qu’il puisse en faire une photocopie. Il avait même apporté sa photocopieuse avec lui ! On lui répond que c’est impossible. Aucun parlementaire n’est autorisé à faire une copie du texte.

Quelques députés démocrates rejoignent ensuite Rand Paul. Ils réclament eux aussi de pouvoir entrer dans la pièce pour voir le texte. On leur dit alors que le texte ne se trouve PAS dans la pièce, dans laquelle on a pourtant interdit à Rand Paul d’entrer pendant de longues minutes.

Les députés démocrates finissent par être autorisés à entrer dans cette fameuse pièce. Ils constatent que le texte ne s’y trouve pas. Ils expliquent alors aux journalistes présents qu’ils ont déjà cherché à se procurer le texte auparavant mais qu’ils ne sont jamais parvenus à savoir où leurs collègues républicains le cachent.

En sortant de la pièce, le Démocrate Steny Hoyer s’arrête dans le couloir et se met à parler à une statue d’Abraham Lincoln (non, ce n’est pas une blague).

Mr. Lincoln, I can’t find the bill. Mr. Lincoln, you said public sentiment is everything. But if the public can’t see the bill, they can’t give us their sentiment. That’s not regular order. That’s not democracy. That’s not good for our people. I know, Mr. Lincoln,  you are as upset with your party as I am. (Mr. Lincoln, je n’arrive pas à trouver la proposition de loi. Mr. Lincoln, vous avez dit que l’opinion publique est la chose la plus importante. Mais si le public ne peut pas voir la proposition de loi, il ne peut pas nous donner son opinion. Ce n’est pas la manière habituelle de procéder. Ce n’est pas la démocratie. Ce n’est pas bon pour le peuple. Je sais, Mr. Lincoln, que vous êtes aussi en colère que moi contre votre parti)

Le lendemain, Rand Paul publiait de nouveaux tweets pour dire que les membres de son staff continuaient à parcourir le Capitole à la recherche du texte, accompagnés de sa photocopieuse. Il a même créé un compte Twitter au nom de celle-ci ! En voici la « biographie »: « Je travaille habituellement dans le bureau de Rand Paul au Sénat. Mais ces derniers jours je suis mobile, à la recherche de la proposition de loi des leaders de la Chambre sur l’Obamacare, afin d’en faire une copie pour le peuple américain ».

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Voici, à titre d’exemple, l’un des tweets publiés par la photocopieuse de Rand Paul.

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Traduction: Si vous quittez votre bureau de la Chambre (vous savez que c’est le cas, nous sommes vendredi à 17h), essayez de trouver l’endroit secret en sortant. Envoyez-moi des indices!

À l’heure où nous écrivions ces lignes, nous ne savions toujours pas où se trouvait la proposition de loi. Mais les députés républicains devraient en révéler le contenu dans les prochains jours.

LE CLASSEMENT DE LA SEMAINE

La semaine dernière, de nombreux élus républicains du Congrès ont refusé d’organiser des réunions publiques (town halls) pour répondre aux questions de leurs administrés. De telles réunions sont souvent organisées par les députés et sénateurs dans leur état durant les semaines où le Congrès est en congé, ce qui était le cas la semaine dernière. Les quelques Républicains qui ont participé à des town halls ont été chahutés par des citoyens inquiets d’une probable future abrogation de l’Obamacare. Certains élus républicains ont affirmé que des activistes démocrates s’étaient organisés pour venir perturber leurs réunions. D’autres les ont annulées, disant craindre des débordements. D’après leurs détracteurs, ils auraient surtout craint pour leur image.

Quoi qu’il en soit, s’il est vrai que les Républicains ont été peu nombreux à avoir le courage d’organiser des town halls la semaine dernière, The Hill faisait remarquer que, depuis le 1er janvier 2015, les dix élus du Congrès en ayant organisé le plus grand nombre étaient tous Républicains !

chartlife
Source: The Hill

Les quatre premiers du classement ont organisé plus de 100 town halls en deux ans ! Notez que Rand Paul occupe la sixième place de ce classement. Si l’on va au-delà du Top 10, on constate que, sur les 50 membres du Congrès ayant organisé le plus de town halls ces deux dernières années, 39 sont Républicains.

LA PHRASE DE LA SEMAINE

White educated women who voted against Hillary? They voted with their husbands on taxes and they always have. (Les femmes blanches éduquées qui ont voté contre Hillary? Elles ont voté avec leurs maris pour les impôts et elles l’ont toujours fait)

Nancy Pelosi, leader des Démocrates à la Chambre, qui ne cesse par ailleurs de dénoncer le sexisme de Donald Trump.

LES LIVRES DE LA SEMAINE

Les futurs mémoires de Barack et Michelle Obama. On ignore encore quand l’ex-Président et l’ex-Première Dame auront fini de les rédiger et quand ils seront publiés. Ce que l’on sait en revanche, c’est qu’ils leur rapporteront beaucoup d’argent (même s’ils ont déjà annoncé qu’une partie des revenus seraient reversés à la Obama Foundation et à d’autres associations). En effet, plusieurs maisons d’édition étaient en concurrence pour obtenir les droits de publication des deux ouvrages. C’est finalement Penguin qui l’a emporté. On ignore la somme exacte déboursée par la maison d’édition, mais le Financial Times rapportait que la barre des 60 millions $ avait été franchie. À titre de comparaison, la maison d’édition Crown avait déboursé 10 millions $ pour publier les mémoires de George W. Bush.

LA STAR DE LA SEMAINE

Tom Hanks. Le célèbre acteur a fait livrer par la poste une nouvelle machine à café à la salle de presse de la Maison Blanche. Elle était accompagnée de la note suivante:

To the White House Press Corps, keep up the good fight for the truth, justice and the American way. Especially the truth part. Tom Hanks. (Aux correspondants à la Maison Blanche, continuez la bataille juste pour la vérité, la justice et la manière de faire américaine. Surtout la vérité. Tom Hanks)

L’INFO PEOPLE DE LA SEMAINE

Nous avons un peu hésité à partager cette info qui relève davantage de la vie privée que de la vie publique. Nous avons finalement décidé de le faire puisque cela fait beaucoup parler à Washington et que Joe Biden a lui-même accepté de s’exprimer à ce sujet. Il ne s’agit donc pas seulement d’une rumeur infondée qui circulerait dans les magazines people, mais bien d’une information réelle et confirmée par l’ancien vice-président en personne. La veuve de Beau Biden, le fils de Joe Biden décédé des suites d’un cancer en mai 2015, entretient désormais une relation amoureuse avec son ex-beau-frère, Hunter Biden. Celui-ci était marié mais a divorcé quelques mois après la mort de son frère. Joe Biden a confirmé la nouvelle à la presse et a déclaré que son épouse et lui avaient accepté la relation unissant leur fils cadet à l’ancienne épouse de leur fils aîné décédé. Ils assurent être « contents pour eux ». Une situation quelque peu étrange mais que la famille semble donc accepter sereinement.

LA PHOTO DE LA SEMAINE

Juste parce que nous la trouvons collector. Voici le sénateur Tim Scott (à droite) et le député Trey Gowdy (à gauche), très amis, en week-end.

20La photo a été publiée par Tim Scott sur son compte Twitter et les internautes n’ont pas manqué de commenter le look de Trey Gowdy, dont on connaît plutôt l’image très sévère affichée lorsqu’il était le président de la commission d’enquête sur l’affaire Benghazi. Certains ont noté une certaine ressemblance avec le rappeur Eminem. D’autres se sont étonnés du port commun du short et du bonnet.

LES TWEETS DE LA SEMAINE

Un peu d’humour avec Mike Huckabee…

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Traduction: Au musée d’Oslo – je ne savais pas si ceci était « Le Cri » d’Edward Munch ou Nancy Pelosi pendant le discours de Donald Trump la semaine dernière.

… et un peu de tendresse avec le sénateur démocrate Chris Murphy.

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Traduction: Mes chiffres « digne de confiance » dans les sondages sont apparemment en train de chuter à mon domicile.

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