L’actualité politique américaine des sept derniers jours s’est révélée un peu plus calme que celle des semaines précédentes. Peut-être à cause d’Halloween… Quoi qu’il en soit, ce petit break fut le bienvenu. Nous vous résumons tout de même les quelques informations importantes à retenir ci-dessous.
LE HÉROS DE LA SEMAINE
Le président Trump a partagé sur Twitter cette photo déclassifiée du chien qui a poursuivi Abou Bakr Al-Baghdadi dans un tunnel lors du raid mené par l’armée américaine à Barisha, en Syrie. Lorsqu’il s’est retrouvé coincé dans le tunnel, le leader de l’Etat Islamique a choisi de se suicider en déclenchant sa ceinture d’explosifs.
Le nom du chien a été déclassifié quelques jours après sa photo. Il se nomme Conan et il s’agit d’un berger malinois, une race de chien belge.
Le Pentagone a précisé que Conan avait été légèrement blessé par des câbles électriques présents dans le tunnel où il pourchassait Al-Baghdadi (et non par l’explosion de la ceinture d’explosifs de ce dernier). Ses blessures sont sans gravité et il devrait se rétablir rapidement. Le Pentagone a aussi indiqué que Conan servait au sein de l’armée américaine depuis quatre ans et avait déjà participé à cinquante missions de combat.
Par ailleurs, nous en savons à présent un peu plus sur le raid mené par les forces américaines à Barisha. D’après le Washington Post, un homme de confiance d’Al-Baghdadi s’était secrètement retourné contre l’Etat Islamique et délivrait depuis des mois des informations capitales à la CIA. Cette taupe était l’un des plus proches assistants d’Al-Baghdadi et s’occupait notamment de l’organisation de ses déplacements à travers la Syrie. Il aurait notamment fourni aux services de renseignement américains le plan exact de la maison dans laquelle Al-Baghdadi était caché et où le raid ayant conduit à sa mort a eu lieu. Il avait aussi averti les Américains du fait qu’Al-Baghdadi était toujours équipé d’une ceinture d’explosifs pour pouvoir se suicider à tout moment.
Toujours d’après les informations obtenues par le Washington Post, cet homme et sa famille ont été exfiltrés de Syrie deux jours après le raid. Ils pourront vivre aux Etats-Unis et vont toucher la récompense de 25 millions de dollars promise par le gouvernement américain à toute personne pouvant fournir des informations menant à la capture d’Al-Baghdadi.
(Notez que ni la Maison Blanche ni le Pentagone n’ont officiellement confirmé les dires du Washington Post).
Enfin, l’Etat Islamique a annoncé dans une vidéo que son nouveau leader serait Abou Ibrahim Al-Hachimi Al-Qourachi. Voici le communiqué officiel publié par le sénateur républicain Ben Sasse à ce propos: « Nous avons tué le dernier salaud meurtrier qui dirigeait l’Etat Islamique. Allons chercher le suivant ».
La politique américaine ne cessera jamais de nous étonner…
LES DERNIÈRES NOUVELLES DE L’IMPEACHMENT INQUIRY
Cette semaine s’est avérée plus calme que les précédentes, mais deux nouveaux témoins ont tout de même été entendus par les comités compétents de la Chambre des Représentants.
- Alexander Vindman a témoigné devant le Congrès
Le lieutenant colonel Alexander Vindman est un ancien militaire. Il était jusqu’à il y a peu membre du Conseil à la sécurité nationale du président Trump. C’est un témoin important puisqu’il était en ligne pour écouter en direct la fameuse conversation téléphonique du 25 juillet entre le président Trump et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky. Lors de son témoignage, Vindman a indiqué que le contenu de cette conversation l’avait immédiatement beaucoup inquiété, au point qu’il en avait parlé à l’un des avocats du Conseil à la sécurité nationale. D’après lui, il n’était pas normal que le président Trump demande à l’un de ses homologues d’annoncer l’ouverture d’une enquête sur l’un de ses opposants politiques.
I did not think it was proper to demand that a foreign government investigate a U.S. citizen. (Je pensais qu’il n’était pas approprié d’exiger qu’un gouvernement étranger enquête sur un citoyen américain)
Le président Trump a accusé Alexander Vindman d’être un « anti-Trump » prêt à déclarer n’importe quoi pour obtenir sa destitution. Certains députés républicains proches du président n’ont pas hésité à remettre eux aussi en question la crédibilité de Vindman, rappelant que celui-ci était né en Union Soviétique et n’était donc peut-être pas « loyal envers les Etats-Unis ». Ces attaques personnelles ont été condamnées par les Démocrates et d’autres élus républicains, qui ont tenté de rappeler leurs collègues à l’ordre. La numéro 3 des Républicains à la Chambre, Liz Cheney, a par exemple déclaré qu’il était « honteux » de remettre en question le patriotisme d’un vétéran. Alexander Vindman est effectivement un vétéran de la guerre en Irak et a reçu le Purple Heart. Il a affirmé lors de son témoignage qu’il s’était précisément engagé dans l’armée américaine pour remercier les Etats-Unis d’avoir accueilli sa famille lorsque celle-ci avait fui l’URSS.
- Tim Morrison a témoigné devant le Congrès
Tim Morrison est un autre ancien membre du Conseil à la sécurité nationale du président Trump. Il a quitté son poste juste avant de délivrer son témoignage devant le Congrès. Tout comme Alexander Vindman, il a écouté en direct la conversation téléphonique du 25 juillet entre les présidents Trump et Zelensky.
Lors de son témoignage, Morrison a confirmé que le président Trump avait bien décidé de ne pas délivrer l’aide militaire promise à l’Ukraine tant que le président Zelensky n’aurait pas annoncé publiquement l’ouverture d’une enquête sur Burisma, l’entreprise ukrainienne qui employait le fils de Joe Biden. Mais, contrairement à Alexander Vindman et à d’autres témoins, Morrison a déclaré que les agissements du président Trump ne l’avaient pas particulièrement inquiété. « Rien d’illégal n’a été discuté », a-t-il affirmé. Une déclaration immédiatement mise en avant par les Républicains.
- La Chambre des Représentants a adopté une résolution formalisant l’existence de l’impeachment inquiry
Ce vote tardif était plus symbolique qu’autre chose. Le lancement de l’impeachment inquiry a en effet été annoncé par la Speaker Nancy Pelosi le 24 septembre dernier et l’enquête bat son plein depuis lors. Cependant, la Chambre des Représentants n’avait jamais organisé de vote pour confirmer que la majorité de ses membres étaient bien favorables au lancement de cette enquête. Il faut dire qu’un tel vote n’est pas obligatoire. Nancy Pelosi a toutefois sans doute finalement décidé de l’organiser afin de répondre aux critiques des Républicains sur le prétendu manque de transparence du processus en cours.
Concrètement, ce vote ne change pas grand-chose, si ce n’est qu’il a forcé tous les députés à prendre officiellement position. Tous les Républicains ont voté contre la résolution. Or, il ne s’agissait pas ici de se prononcer en faveur de l’impeachment du président. Il s’agissait seulement de se prononcer en faveur de l’ouverture d’une enquête visant à faire la lumière sur les faits mis en avant par un lanceur d’alerte, afin de déterminer ensuite s’il y a lieu ou non de lancer une procédure de destitution contre le président.
Justin Amash, ancien député républicain qui a récemment quitté le parti et siège désormais à la Chambre en tant que député indépendant, a voté en faveur de la résolution avec la majorité des Démocrates.
Deux députés démocrates ont voté contre la résolution avec les Républicains. Il s’agit de Jeff Van Drew, député du New Jersey, et de Collin Peterson, député du Minnesota. Van Drew s’est justifié en affirmant qu’il estimait que l’impeachment inquiry n’était pas une bonne chose car elle ne faisait que « diviser plus profondément le pays ».
La résolution adoptée précise aussi que le président du comité du renseignement de la Chambre des Représentants, Adam Schiff, pourra décider de convoquer des témoins pour des auditions publiques dans les semaines à venir. Après des semaines de témoignages à huis clos, des auditions publiques auront donc vraisemblablement bientôt lieu ❗
LE DÉMÉNAGEMENT DE LA SEMAINE
Le président Trump a déménagé sa résidence principale de New York en Floride. Les démarches administratives nécessaires ont été effectuées fin septembre.
Donald Trump possède plusieurs propriétés aux Etats-Unis mais sa résidence principale déclarée était jusqu’ici située à New York – la fameuse Trump Tower située à Manhattan. Sa nouvelle résidence principale est située à Palm Beach, en Floride.
Le président a déclaré avoir pris cette décision à contrecœur et s’est justifié en affirmant que « malgré le fait que je paye des millions de dollars de taxes locales chaque année [à New York], je suis très mal traité par les leaders politiques de la ville et de l’état de New York ».
ROAD TO 2020
La principale information de la semaine est que Beto O’Rourke a mis un terme à sa campagne présidentielle.
- Beto O’Rourke n’est plus candidat à l’élection présidentielle
L’ex-député du Texas a annoncé qu’il mettait un terme à sa campagne présidentielle. « Nous devons reconnaître que nous n’avons pas les moyens de poursuivre cette campagne avec succès », a-t-il affirmé devant des supporters attristés qui s’attendaient à assister à un meeting de leur candidat favori. Il y a encore quelques mois, personne n’aurait probablement misé sur un abandon de Beto O’Rourke aussi tôt dans la campagne. Comme quoi, tout peut très vite changer en politique…
- Kamala Harris en difficulté?
La campagne de Kamala Harris a décidé de fermer trois de ses quatre bureaux dans le New Hampshire pour concentrer ses efforts sur l’Iowa, le premier état à voter dans le cadre des primaires. Plusieurs des employés de la campagne ont également été licenciés.
- Joe Manchin affirme qu’il ne votera pas pour Bernie Sanders en cas de duel entre le sénateur du Vermont et Donald Trump en novembre 2020
Lors d’une interview sur Fox News, le sénateur démocrate Joe Manchin a indiqué qu’il ne voterait pas pour Bernie Sanders si ce dernier était le candidat de son parti opposé à Donald Trump lors de l’élection présidentielle de 2020 ! Lorsque le journaliste qui l’interrogeait lui a demandé pour qui il voterait en cas de duel Sanders-Trump en novembre 2020, Manchin a répondu: « Ce ne serait pas pour Bernie ». Le journaliste lui a ensuite demandé si cela signifiait qu’il voterait pour Donald Trump dans ce cas de figure. Manchin n’a pas répondu par l’affirmative, se contentant d’un vague « Disons que je prendrai ma décision en fonction de ce qu’il y a de mieux pour mon pays ».
LE SONDAGE DE LA SEMAINE
D’après un sondage réalisé par la University of North Florida, le nouveau gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis (élu en novembre 2018) est très populaire dans son état. 72% des citoyens de Floride affirment avoir une bonne opinion de leur gouverneur, contre 17% seulement d’opinions défavorables. Il est aussi intéressant de constater que DeSantis semble avoir conquis ses administrés afro-américains (seulement 32% d’opinions défavorables) et hispaniques (seulement 8% d’opinions défavorables).
Les deux sénateurs républicains de Floride disposent aussi de davantage d’avis favorables que d’avis défavorables, mais ils sont tout de même beaucoup moins populaires que le gouverneur. Rick Scott dispose de 49% d’opinions favorables, contre 32% d’opinions défavorables. Marco Rubio dispose de 48% d’opinions favorables, contre 34% d’opinions défavorables.
LA PHOTO DE LA SEMAINE
Quand un incendie menace la Ronald Reagan Presidential Library à Simi Valley, en Californie. Le bâtiment a dû être évacué par précaution mais a finalement été épargné par les flammes grâce au travail des pompiers. La Californie est de nouveau confrontée en ce moment à plusieurs incendies ravageurs.
MEANWHILE, IN ALABAMA…
Vous vous souvenez très certainement de cette loi adoptée en mai dernier en Alabama et y interdisant totalement l’avortement, sauf en cas de danger sérieux pour la santé de la mère, de grossesse extra-utérine ou de malformation létale du fœtus. Cette législation avait fait beaucoup parler d’elle, notamment parce qu’elle ne prévoyait aucune exception en cas de viol ou d’inceste. Après son adoption, plusieurs associations citoyennes avaient décidé de porter plainte, jugeant la nouvelle loi inconstitutionnelle. Un juge leur a donné raison cette semaine. Son jugement bloque l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, initialement prévue le mois prochain. L’état de l’Alabama va faire appel de cette décision et l’affaire risque donc de finir par être examinée par la Cour Suprême, ce qui n’est pas forcément pour déplaire aux militants anti-avortement. Ceux-ci n’ont jamais caché qu’ils espéraient que l’affaire remonterait jusqu’à la Cour Suprême, qui devrait alors se prononcer à nouveau sur le sujet de l’avortement. Les militants anti-avortement ont l’espoir que la Cour Suprême revienne alors sur son arrêt emblématique Roe v. Wade, qui a légalisé la pratique de l’avortement aux Etats-Unis en 1973. Leurs espoirs sont en grande partie fondés sur la nouvelle composition de la Cour Suprême. Donald Trump y a nommé deux nouveaux juges depuis le début de son mandat et l’équilibre de la Cour en a été modifié. Elle est désormais composée de cinq juges réputés conservateurs, contre quatre juges réputés libéraux.
L’IMAGE DE LA SEMAINE
Terminons par ces images de joie intense à Washington, D.C. L’équipe de baseball de la capitale américaine a remporté les World Series cette semaine pour la première fois de son histoire. Les Washington Nationals ont remporté le titre suprême en matière de baseball en battant les Houston Astros en finale. Cet exploit a fait oublier la politique aux habitants de Washington pendant quelques heures. Ils étaient des centaines de milliers à faire la fête sur le National Mall et dans les rues de la ville ce samedi pendant que les joueurs de leur équipe défilaient à bord d’un bus pour leur présenter leur trophée.